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Rapport d'étude approfondie

Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère
proposé par Hydro-Québec

Loi canadienne sur l'évaluation environnementale
Rapport d'étude approfondie

Préparé par
Ministère des Pêches et des Océans du Canada
Région Laurentienne

Juin 1999

Informations générales

Date : 4 juin 1999
Promoteur : Hydro-Québec
Type de projet : Construction et exploitation d'une centrale hydroélectrique
Déclencheur Loi sur les pêches, paragraphe 35(2)
Autorité responsable : Ministère des Pêches et des Océans du Canada
Type d'étude : Étude approfondie en vertu du « Règlement sur la liste d'étude approfondie », paragraphe 4(b).

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Résumé

Hydro-Québec projette la construction d'un nouvel aménagement hydroélectrique au site de Grand-Mère, sur la rivière Saint-Maurice.

La centrale hydroélectrique de Grand-Mère (150 MW) présente des problèmes de vétusté et des difficultés d'opération. De plus, le débit d'équipement insuffisant de la centrale (5 925 m³/s) occasionne un goulot d'étranglement sur la rivière et empêche ainsi l'optimisation de production des aménagements du complexe Saint-Maurice situés en aval (Shawinigan I et II, La Gabelle).

Des différentes options étudiées (abandon de l'aménagement, réhabilitation ou construction d'une nouvelle centrale), il a été déterminé que la construction d'une nouvelle centrale s'avère la solution la plus acceptable au niveau économique, social et environnemental, tout en étant en accord avec le plan stratégique d'Hydro-Québec.

Le nouvel aménagement sera composé de nombreux ouvrages neufs (centrale de 220 MW, ouvrages d'évacuation d'une capacité de 8 225 m³/s, poste de départ, ouvrages de protection) de même que de certains ouvrages existants (centrale, barrage-poids gauche et droit). La centrale existante sera préservée, ses équipements seront démantelés et sa vocation sera déterminée suite aux recommandations d'un comité formé par l'entreprise et le milieu.

En hiver (mi-décembre à la mi-mars), Hydro-Québec adoptera un nouvel horaire de production afin que la centrale contribue à la production de pointe et ce, de façon simultanée avec les centrales situées en aval. La centrale sera équipée de façon à pouvoir s'ajuster rapidement à un débit de production entre 200 et 1 040 m³/s. Ce nouveau mode de production occasionnera une fluctuation du niveau d'eau qui amènera la formation de bourrelets de glace et de fissures le long des rives qui pourront nuire ainsi à l'accessibilité du cours d'eau pour la pratique d'activité hivernale.

La mise en service des nouveaux ouvrages régulateurs occasionnera des modifications hydrodynamiques importantes dans le milieu et entraînera la disparition d'une frayère à achigan à petite bouche (150 m²) et à meuniers (1 547 m²) située en aval du barrage-poids gauche, de même que l'ensablement d'environ 3 100 m² d'une frayère à meuniers située en aval de la pointe à Simard.

Une évaluation environnementale du projet doit être réalisée en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCÉE) car celui-ci occasionne une perte de capacité de production de l'habitat du poisson qui nécessite l'émission d'une autorisation en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches (LP).

Ce rapport répond à l'obligation du ministère des Pêches et des Océans (MPO) comme autorité responsable, établie en vertu de la LCÉE, de réaliser une évaluation des effets environnementaux du projet en consultation avec d'autres autorités fédérales disposant d'une expertise appropriée.

Compte tenu des mesures d'atténuation et des programmes de suivi proposés ainsi que des engagements du promoteur, le MPO a déterminé que le projet proposé, tel que défini par la portée de l'étude, n'est pas susceptible d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants.

1. Introduction

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1. Introduction

Le ministère des Pêches et des Océans (MPO) a préparé ce rapport d'étude approfondie pour le projet du nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère proposé par Hydro-Québec, promoteur du projet. Ce rapport répond à l'obligation du MPO comme autorité responsable, établie en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCÉE), de réaliser une évaluation des effets environnementaux du projet en consultation avec d'autres autorités fédérales disposant d'une expertise appropriée.

Ce document comprend une description sommaire du projet et du milieu dans lequel il sera réalisé, les résultats des consultations du public réalisés par le promoteur, un résumé des principaux effets environnementaux, des effets cumulatifs et des effets causés par les accidents et défaillances qu'il est susceptible d'engendrer, l'énoncé des mesures d'atténuation et de suivi qui y sont associées, la détermination de l'importance des ces effets, les conditions d'approbation ainsi qu'une conclusion préliminaire sur l'acceptabilité environnementale du projet.

Les documents mentionnés ci-dessous font également partie du rapport d'étude approfondie et ont été utilisés pour la rédaction du présent document. On y retrouve, de façon plus détaillée, des informations relatives aux éléments mentionnés ci-dessus de même que les réponses du promoteur aux questions soulevées lors de l'analyse de recevabilité, établie dans le cadre de la procédure d'évaluation environnementale québécoise, ainsi que les éléments supplémentaires requis pour répondre aux exigences d'une évaluation environnementale réalisée en vertu de la LCÉE.

  • Hydro-Québec, 1998, Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère. Rapport d'avant-projet, volume 1, 257 p. + 4 annexes.
  • Hydro-Québec, 1998, Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère. Rapport d'avant-projet, volume 2, 321 p. + 4 annexes.
  • Hydro-Québec, 1999, Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère. Complément du rapport d'avant-projet, 206 p. + 8 annexes.
  • Hydro-Québec, 1999, Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère. Résumé du rapport d'avant-projet, 43 p. + 2 annexes.
  • Hydro-Québec, 1999, Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère. Lettre de Jacques Dumas (Hydro-Québec) à Jean-Guy Jacques (MPO) contenant les réponses du promoteur aux questions et commentaires supplémentaires des autorités fédérales, 8 p.
  • Ministère des Pêches et des Océans, 1998, Construction d'une centrale hydroélectrique, Grand-Mère. Lettre de Jean Piuze (MPO) à Gaétan Guertin (Hydro-Québec) contenant des commentaires et questions des autorités fédérales, 17 p.
  • Ministère des Pêches et des Océans, 1999, Construction d'une centrale hydroélectrique, Grand-Mère. Lettre de Jean-Guy Jacques (MPO) à Michel Bérubé (Hydro-Québec) contenant des commentaires et questions des autorités fédérales, 7 p.

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2. Description du projet

Cette section présente un résumé des informations concernant le contexte et la justification du projet, les autres moyens de réalisation et les variantes proposées, de même que la description de l'aménagement retenu, qui sont retrouvés aux chapitres 1, 3 et 4 du volume 1 du rapport d'avant-projet et dans le complément du rapport d'avant-projet produit par le promoteur. 

2.1. Contexte du projet et justification

Hydro-Québec projette la construction d'un nouvel aménagement hydroélectrique au site de Grand-Mère, sur la rivière Saint-Maurice.

La centrale hydroélectrique de Grand-Mère, construite entre 1913 et 1916 pose des problèmes de vétusté et des difficultés d'opération. De plus, le débit d'équipement insuffisant de la centrale occasionne un goulot d'étranglement sur la rivière et empêche ainsi l'optimisation de production des aménagements du complexe Saint-Maurice situés en aval (Shawinigan I et II, La Gabelle).

La centrale existante, située en rive droite (rive ouest), possède neuf groupes turbines de type Francis, qui assurent une puissance installée de 150 MW. Son débit d'équipement de pointe est de 880 m³/s. L'aménagement est doté d'un poste de départ sur son toit de même que d'ouvrages d'évacuation d'une capacité maximale de 5 925 m³/s.

L'analyse de l'état de l'aménagement actuel a permis au promoteur d'identifier quatre problématiques majeures qui ont démontré le besoin d'une intervention importante pour poursuivre adéquatement l'exploitation du site. Ces problématiques sont liées :

  • aux groupes turbines-alternateurs qui, en raison de leur âge (50 ans) ainsi que de leur état de dégradation avancé, nécessitent un besoin de réfection majeure. Ces derniers atteindront la fin de leur vie utile au début de l'an 2000;
  • au poste de départ qui présente des difficultés d'opération causées principalement par son manque de flexibilité et sa faible capacité électrique;
  • aux ouvrages d'évacuation de crue dont le béton montre un degré de détérioration avancé, et dont les difficultés d'opération et d'entretien des vannes augmentent les besoins d'intervention aux fins de la sécurité des ouvrages. De plus, la révision du critère ayant trait à la capacité d'évacuation de l'aménagement nécessite la réalisation de travaux aux ouvrages d'évacuation afin qu'ils puissent résister aux charges additionnelles occasionnées par des crues exceptionnelles; et
  • à la centrale qui présente un goulot d'étranglement sur la rivière Saint-Maurice et fait en sorte que le débit d'équipement, de beaucoup inférieur à Grand-Mère, n'est pas optimisé sur l'ensemble des aménagements du complexe Saint-Maurice.

Des trois options étudiées (abandon de l'aménagement, réhabilitation ou construction d'une nouvelle centrale), le promoteur a déterminé que la construction s'avère la solution la plus acceptable sur le plan économique, social et environnemental, tout en étant en accord avec le plan stratégique d'Hydro-Québec.

Le projet proposé par le promoteur repose sur l'évaluation de trois variantes de construction de la centrale, des ouvrages d'évacuation et du poste de départ et de cinq options de construction des chemins d'accès aux ouvrages.

Le projet de nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère s'inscrit dans le cadre du « Plan stratégique 1998-2002 » d'Hydro-Québec dont une des orientations consiste à maintenir les tarifs et la qualité de service en fourniture d'énergie au Québec. Cela se traduit entre autres par le maintien de la pérennité du parc de production afin d'assurer la sécurité et la fiabilité des approvisionnements en électricité pour les années à venir. Le projet fait partie du programme de réhabilitation des aménagements existants du groupe Production d'Hydro-Québec qui vise à conserver les installations en bon état en vue d'une disponibilité maximale du parc de production au plus bas coût.

La réhabilitation d'un aménagement existant présente de nombreux avantages sur le plan tant économique qu'environnemental et répond aux recommandations formulées par certains groupes au cours de consultations tenues sur le plan de développement de 1993, qui invitaient Hydro-Québec à réaliser en priorité toutes les améliorations possibles au réseau existant avant de recourir à de nouveaux projets pour satisfaire la demande.

2.2. Autres moyens de réalisation du projet

2.2.1. Détermination de l'avenir de l'aménagement

Dans le cadre du processus d'étude de réhabilitation d'aménagements de production, Hydro-Québec a analysé les options suivantes au plan technique, économique et financier, et environnemental :

  • la réhabilitation de l'aménagement existant;
  • le remplacement de l'aménagement existant par un nouveau, établi au même endroit de la rivière ou à proximité; et
  • la désaffectation de l'aménagement actuel.

La désaffectation n'a toutefois pas été retenue aux fins de l'analyse comparative étant donné que le critère d'aménagement de la nouvelle centrale, à un coût inférieur à 3 ¢/kWh, rend cette option non concurrentielle. De plus, la réfection nécessaire des ouvrages d'évacuation existants, en raison de questions de fiabilité et de sécurité, augmenterait le coût de la désaffectation.

À la lumière des résultats de l'analyse comparative réalisée, le promoteur a déterminé que la construction d'un nouvel aménagement au site de Grand-Mère représente la solution la plus avantageuse (tableau 1). Cette solution règle le problème de vétusté de l'aménagement et élimine le goulot d'étranglement à la sortie de la centrale.

Tableau 1 : Résultat de l'analyse comparative des deux options de réalisation du projet
  Nouvel aménagement Réhabilitation
Critères techniques
Gain en puissance 81 MW 10 MW
Gain en énergie 234 GWh 63 GWh
Critères économiques
Travaux 451,3 M$ 426,1 M$
Coût pour service équivalent - 133,5 M$
Total de l'investissement 451,3 M$ 559,6 M$
Perte de production durant les travaux - 6 M$
Frais d'entretien et d'exploitation 31 M$ 58,1 M$
Total 482,3 M$ 623,7 M$
Critères financiers
Puissance installée 220 MW 150 MW
Puissance de pointe 215 MW 144 MW
Énergie annuelle moyenne 1209 GWh 1038 GWh
Coût pour service équivalent (en dollars 2004) 482,3 M$ 623,7 M$
Coût financier avec rendement de 11% 2,89 ¢/kWh 3,25 ¢/kWh
Taux de rendement interne au tarif de fourniture 2,81 ¢/kWh sur un horizon de 30 ans 9,9 % 4, 7 %
Critères environnementaux Acceptable Acceptable

2.2.2. Variantes d'aménagement

À la suite de la décision de remplacement de l'équipement existant, Hydro-Québec a élaboré différentes variantes d'aménagement et a comparé celles-ci sur le plan technique, économique et environnemental. Trois variantes de la centrale et des ouvrages d'évacuation, trois variantes du poste de départ et cinq variantes des chemins d'accès aux ouvrages ont ainsi été évaluées.

Les variantes retenues sont celles qui composent le projet proposé. Pour la centrale et les ouvrages d'évacuation, la variante retenue n'exige pas de dragage ni d'excavation en eaux, les travaux de batardages sont les moins importants, son coût est plus bas et les impacts occasionnés sur la faune et l'utilisation de la rivière sont moindres qu'avec les deux autres options. Le chemin d'accès retenu a été préféré notamment en raison de son caractère sécuritaire, du fait qu'il est éloigné des zones résidentielles et qu'il nécessite un volume de remblai beaucoup moins important que les autres options. Quant au poste de départ, les critères techniques (fiabilité suffisante, absence de renforcement du toit) et économiques (plus faible coût) ont favorisé la construction d'un poste traditionnel alors que les critères environnementaux (impact visuel) ont favorisé la construction du poste sans lignes aériennes entre celui-ci et la centrale.

La détermination du choix d'un site de dépôt des déblais d'excavation occasionnés par le projet s'est effectuée comme suit. Les coûts élevés liés au transport, les impacts environnementaux importants, de même que des problèmes pratiques liés à la circulation urbaine, ont fait en sorte que les sites de dépôt existants ne pouvaient être utilisés comme aires de déblais. Deux autres sites ont toutefois été identifiés comme pouvant potentiellement recevoir ces déblais. Il s'agit d'un terrain situé immédiatement au sud des installations de chantier, en bordure de la rivière Saint-Maurice et d'une sablière établie juste à l'est de la voie ferrée du Canadien national (CN), sur la rive gauche (rive est) de la rivière. L'analyse de ces deux variantes s'est appuyée sur la valeur des peuplements végétaux qui seront détruits de même que sur l'impact visuel au site de remblaiement. Le site de la sablière exploitée, propriété d'Excavation Gaston Trépanier, s'est révélé une solution plus avantageuse que le remblayage du terrain boisé attenant à la rivière Saint-Maurice.

Le MPO est satisfait de l'analyse des variantes réalisée par le promoteur et est d'avis que les options proposées représentent celles occasionnant le moins d'impact pour l'environnement. 

2.3. Définition du projet

2.3.1 Infrastructures

Le nouvel aménagement sera composé de nombreux ouvrages neufs (centrale, ouvrages d'évacuation, poste de départ, travaux de protection des ouvrages) de même que de certains ouvrages existants (centrale, barrage poids gauche et droite) (figure 1).

La nouvelle centrale, située en rive gauche, sera équipée de trois groupes de turbines de type Kaplan qui lui assureront une puissance installée de 220 MW et un débit d'équipement de 1 040 m³/s. La centrale de type en surface avec prise d'eau intégrée sera alimentée par un court canal d'amenée débutant en aval de l'évacuateur actuel qui sera partiellement démoli.

Les nouveaux ouvrages d'évacuation, au nombre de trois et d'une capacité totale de 8 225 m³/s au niveau maximal d'exploitation, comprennent :

  • un évacuateur de crue principal d'une capacité d'évacuation de 4 462 m³/s;
  • un ouvrage régulateur d'une capacité de 2 185 m³/s; et
  • un évacuateur de crue secondaire d'une capacité de 1 578 m³/s.

Ces ouvrages sont conçus pour que tout débit de crue exceptionnel puisse franchir l'aménagement avec un niveau d'eau à l'amont de la centrale qui sera égal ou inférieur à celui de l'aménagement existant (0 à 1,21 m plus bas).

Un poste de départ, de type classique, sera établi en rive gauche à environ 150 m de la nouvelle centrale. D'une capacité de 69 kV, il comprend huit départs de lignes dont deux sont prévus pour des besoins futurs. Le raccordement entre le poste de départ et le poste de transformation, situé sur le toit de la future centrale, sera assuré par trois circuits de câbles souterrains. Le poste sera d'abord exploité à 69 kV, mais ses équipements permettront une augmentation de la tension à 120 kV lorsque des besoins supérieurs se préciseront.

Figure 1 : Nouvel aménagement de Grand-Mère
Figure 1 : Nouvel aménagement de Grand-Mère
Source : Hydro-Québec. Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère. Bulletin d'information, numéro 3 - été 1998.

Un chemin d'accès aux ouvrages d'une longueur de 1,45 km sera construit et une intersection sera aménagée avec la route 153. De courts chemins temporaires seront également construits pour accéder aux différents chantiers et ouvrages, à l'aire de dépôt des déblais et des rebuts de même que pour accéder à la voie ferrée du CN afin de prendre livraison d'équipements lourds, tels que les transformateurs de puissance de la nouvelle centrale.

Le projet comprendra la désaffectation du bâtiment de la centrale existante de même que le démantèlement de son équipement (turbines-alternateurs, appareillages, etc.), le remblayage en eau (pied des aspirateurs, mur de soutènement aval, extrémités aval de la digue en enrochement), des travaux liés aux ouvrages de protection (barrage-poids droite, cloison droite, digue en enrochement en rive droite) de même que l'arasement de l'évacuateur de crue et du déversoir existant. La prise d'eau de la centrale servira dorénavant comme ouvrage de retenue du bief amont pour le nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère.

La construction du nouvel aménagement et la modification des ouvrages existants se dérouleront en trois étapes qui nécessiteront deux phases de dérivation des eaux de la rivière Saint-Maurice. Les travaux comprendront notamment la mise en place de batardeaux, les activités de bétonnage, l'excavation en eau et l'utilisation d'explosifs.

Les travaux d'excavation généreront une grande quantité de déblai de roche évaluée à environ 1 500 000 m³. Les volumes de matériaux qui pourront être utilisés par le projet sont estimés à 1 059 000 m³, d'où une quantité de déblais excédentaires d'environ 500 000 m³.

Le promoteur a choisi de déposer ces déblais de roche dans une partie d'une sablière exploitée située en rive gauche, de l'autre coté de la voie ferrée du CN. Un chemin d'accès le long de la voie ferrée devra être aménagé et le passage à niveau existant devra être modifié de façon à permettre la circulation de véhicules lourds. Hydro-Québec est encore en négociation avec le propriétaire du site au sujet de l'obtention d'une servitude perpétuelle sur la partie exploitée de cette sablière où seront déposés les déblais de roche excédentaires. 

2.3.2. Gestion de l'aménagement

La nouvelle centrale est équipée de façon à pouvoir s'ajuster rapidement à un débit de production entre 200 et 1 040 m³/s au cours de la période hivernale. De la mi-mars à la mi-décembre, le mode de gestion de la centrale restera semblable à ce qu'il est actuellement le niveau d'eau du réservoir sera maintenu près du niveau maximal de façon à optimiser la production de l'aménagement.

En hiver (mi-décembre à la mi-mars), Hydro-Québec adaptera l'horaire de production afin que la centrale contribue à la production de pointe et ce, de façon simultanée avec les centrales situées en aval. Au cours d'une journée, ces centrales fonctionneront durant une ou deux périodes de pointe à des débits pouvant atteindre 1 040 m³/s et à des débits réduits compris entre 200 et 400 m³/s durant les périodes creuses.

L'horaire de production de pointe de chaque journée sera adapté selon la demande et les contraintes techniques. Trois modes d'exploitation prévaudront : 1) un mode pour répondre à la demande de pointe horaire du matin et du soir pendant les périodes de demande maximale (15 jours); 2) un mode d'exploitation en pointe au rendement optimal (60 jours) et 3) le mode normal le reste du temps (15 jours). Sous un mode d'exploitation en pointe horaire maximal, la centrale de Grand-Mère turbinera des débits de 255 m³/s en période creuse (13 heures) et des débits de 1 040 m³/s en période de pointe (11 heures). En mode de production optimale en pointe, la centrale turbinera des débits de 225 m³/s pendant la nuit (7 heures) et des débits de 830 m³/s le reste de la journée (17 heures).

Le promoteur mentionne qu'il tentera d'optimiser la gestion en pointe horaire de façon à favoriser la stabilité du couvert de glace.

Les variations du niveau d'eau, attribuables à ce nouveau mode d'exploitation, seront différentes dans chacun des tronçons de la rivière touchés par le projet. On retrouve aux figures 2 et 3 la localisation de ces différents biefs.

Le marnage quotidien du bief amont de Grand-Mère en saison froide sera d'environ 0,7 m avant la formation de la couverture de glace et de 0,9 m après sa formation. Ces fluctuations, plus importantes que celles existant actuellement (0,3 m) sont toutefois comprises à l'intérieur des niveaux d'exploitation minimale et maximale du réservoir (101,19 m et 102,56 m).

Deux modes de gestion des marnages seront adoptés dans le tronçon de la rivière compris entre les centrales de Grand-Mère et de Shawinigan. Dans la partie amont du bief, les variations du niveau d'eau, notées entre le barrage et les rapides des Hêtres, seront les plus importantes parmi celles qui seront relevées dans les différents biefs touchés par le projet. Le marnage maximal actuel d'environ 0,5 m aux rapides des Hêtres augmentera à 1,43 m suite au projet alors qu'à la centrale, il passera de 0,8 m à plus ou moins 2 m selon qu'il y a ou non présence d'un couvert de glace. Ces variations de débits nécessiteront l'installation, d'octobre ou novembre au printemps suivant, d'une estacade de glace à l'amont immédiat des rapides des Hêtres afin d'améliorer la stabilité de la couverture de glace dans ce secteur.

Les variations des niveaux d'eau qui seront notées dans la partie aval du bief, compris entre les rapides des Hêtres et la centrale de Shawinigan, seront de mêmes amplitudes ou plus faibles que les variations maximales déjà relevées entre ces deux sites.

Selon le mode de production en vigueur, de légères augmentations ou diminutions, par rapport aux marnages maximums existants, seront également notées dans le tronçon de la rivière compris entre le barrage de Shawinigan et de La Gabelle suite à l'adoption des nouveaux modes d'exploitation hivernale. Exception faite du réservoir amont de La Gabelle, qui exige une diminution de 0,5 m du niveau minimal d'exploitation, les marnages des autres biefs des centrales touchés par le projet seront compris à l'intérieur de la fourchette actuelle des marnages maximaux en exploitation normale.

Figure 2 : Zone d'étude locale et étendue
Figure 2 : Zone d'étude locale et étendue
Source : Hydro-Québec. Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère, 1998, figure 2.1.

Figure 3 : Zone d'influence
Figure 3 : Zone d'influence
Source : Hydro-Québec. Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère, 1998, figure 2.2.

2.4. Coût et échéancier de réalisation

Le coût du nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère est estimé à 454 millions de dollars et est en accord avec le critère de rentabilité du promoteur (coût de production inférieur à 3 ¢/kWh). Le début des travaux de construction est prévu pour mars 2000 alors que la mise en service de la nouvelle centrale aura lieu au cours du printemps 2004.

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3. Évaluation environnementale et réglementation applicable

Une évaluation environnementale du projet doit être réalisée en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCÉE), car celui-ci occasionne une perte de capacité de production de l'habitat du poisson qui nécessite l'émission d'une autorisation en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches (LP). Cette autorisation constitue un déclencheur de la LCÉE en vertu du Règlement sur les dispositions législatives et réglementaires désignées.

Avant qu'une telle autorisation ne soit accordée, le promoteur doit proposer une mesure de compensation qui respecte le principe d'aucune perte nette de la capacité de production de l'habitat, tel qu'indiqué dans la Politique de gestion de l'habitat du poisson du MPO. Cette mesure doit être assujettie aux obligations légales d'une entente de compensation liant le promoteur et le MPO.

Comme le spécifie le paragraphe 4(b) du Règlement sur la liste des études approfondies, un projet de construction, de désaffectation ou de fermeture d'une centrale hydroélectrique d'une capacité de production de 200 MW ou plus, nécessite la réalisation d'une évaluation environnementale de type étude approfondie.

Une étude approfondie réalisée en vertu de la LCÉE est une méthode d'auto-évaluation selon laquelle l'autorité fédérale responsable examine, avant de prendre des décisions irrévocables, les répercussions environnementales d'un projet.

Au sens de la LCÉE, le ministère des Pêches et des Océans (MPO), par l'entremise de la Division de la gestion de l'habitat du poisson (DGHP), est la seule autorité fédérale responsable dans le dossier. Le MPO s'est assuré que le processus d'évaluation environnementale de même que l'étude approfondie sont conformes aux exigences de la LCÉE.

D'autres ministères fédéraux ont également été consultés afin de déterminer leur attribution pour le projet et pour obtenir leurs commentaires sur leurs exigences respectives à l'égard de l'évaluation environnementale en vertu de la LCÉE. Il s'agit du ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada (MAINC), d'Environnement Canada (EC), de Ressources naturelles Canada (RNC), de Parcs Canada (PC) et de l'Office des transports du Canada (OTC). L'agence canadienne d'évaluation environnementale (ACÉE) a également collaboré à ce dossier sur des questions d'interprétation de la LCÉE et sur le plan méthodologique.

Le MAINC ne prévoit pas exercer d'attribution pour ce projet étant donné que le site sur lequel se déroule celui-ci n'est pas une terre indienne et ne fait pas partie d'un territoire dont la revendication, par le Conseil de la nation Atikamekw, a été reconnue et approuvée par ce ministère.

EC agit à titre de ministère expert pour le projet en fonction de ses champs de compétence, soit l'avifaune et les terres humides. Afin d'être en mesure de bien évaluer les impacts sur l'avifaune, EC a demandé la réalisation d'inventaires des oiseaux nicheurs dans les habitats qui seront détruits lors des travaux de construction.

RNC, en tant qu'autorité fédérale spécialisée, peut fournir des avis concernant l'utilisation et l'entreposage d'explosifs de même que sur les exigences pour les installations nécessaires à la fabrication d'explosifs sur le chantier. En vertu de la Loi sur les explosifs, RNC doit émettre une licence pour l'entreposage ou la fabrication d'explosifs et l'émission de cette licence nécessite qu'une évaluation environnementale en vertu de la LCÉE soit réalisée. Une demande d'information au promoteur a été faite à ce sujet. À ce jour, il n'est pas certain si une telle licence sera requise.

PC ne possède aucun intérêt particulier pour ce projet, étant donné que le mode d'exploitation de la nouvelle centrale n'affectera pas le niveau d'eau bordant le territoire du parc national de la Mauricie dont il est le gestionnaire. La division Patrimoine culturel et Biens immobiliers de Parcs Canada a fourni un avis expert concernant la protection du patrimoine bâti et technologique susceptible d'être touché par le projet.

L'OTC ne prévoit exercer aucune attribution pour le projet en vertu de la Loi sur la sécurité ferroviaire. La modification du passage à niveau de la voie ferrée pour le passage des véhicules lourds nécessitera toutefois une entente avec le CN qui définira les clauses administratives entre les deux parties concernant l'entretien et la construction de cet aménagement.

Du côté de la procédure provinciale, ce projet est assujetti à l'article 31.1 de la Loi sur la qualité de l'environnement du Québec, qui nécessite qu'une évaluation et un examen des impacts sur l'environnement soient réalisés. Le ministère des Pêches et des Océans de même qu'Environnement Canada ont participé à l'analyse de recevabilité de l'étude du projet établie dans le cadre de cette procédure. Les commentaires émis ont été acheminés au promoteur, avec ceux des différents autres ministères et organismes québécois impliqués, sous un même pli, par le ministère de l'Environnement du Québec. Les commentaires des deux organismes fédéraux concernés étaient les mêmes que ceux produits pour la procédure LCÉE.

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4. Portée du projet et de l'évaluation environnementale

La portée du projet comprend la construction de la centrale, des ouvrages de régulation et du poste de contrôle, la démolition des ouvrages de régulation et du déversoir existants, la désaffectation de la centrale existante de même que la modification du mode d'exploitation hivernale de l'aménagement sur la rivière Saint-Maurice.

L'évaluation environnementale comprend l'étude des effets environnementaux du projet y compris ceux causés par les accidents ou défaillances pouvant en résulter, et les effets cumulatifs que sa réalisation, combinée à l'existence d'autres ouvrages ou à la réalisation d'autres projets ou activités, est susceptible de causer à l'environnement.

Les effets environnementaux, tel que défini par le paragraphe 2(1) de la LCÉE, sont les changements causés par le projet à l'environnement biophysique et les effets qui découlent directement de ces changements sur la santé humaine, les conditions socio-économiques, le patrimoine naturel et culturel (historique, archéologique, paléontologique et architectural), ainsi que l'utilisation actuelle des terres et des ressources naturelles à des fins traditionnelles par les autochtones.

L'étude porte également sur les éléments suivants :

  • les raisons d'être du projet;
  • les différents moyens de réalisation du projet;
  • l'importance des effets environnementaux;
  • les effets de l'environnement sur le projet;
  • les observations du public;
  • les mesures d'atténuation;
  • la nécessité d'un programme de suivi et ses modalités; et
  • l'évaluation de la capacité des ressources renouvelables, risquant d'être touchées de façon importante par le projet, de répondre aux besoins du présent et à ceux des générations futures.

L'évaluation environnementale du projet est également basée sur la directive du ministère de l'Environnement et de la Faune, émise en 1994, indiquant la nature, la portée et l'étendue de l'étude d'impact sur l'environnement, à laquelle s'ajoutent des considérations particulières d'autorités fédérales, telles que la Politique de gestion de l'habitat du poisson du MPO concernant le respect du principe d'aucune perte nette de l'habitat du poisson et la Politique fédérale de conservation sur les terres humides.

Selon l'étendue des impacts appréhendés, les limites de la zone d'étude peuvent être divisées en trois zones distinctes, soit la zone d'étude locale (figures 1 et 2), la zone d'étude étendue (figure 2) et la zone d'influence (figure 3).

La zone d'étude locale, d'une longueur d'environ 1,5 km, couvre le secteur qui risque le plus d'être touché par le projet. Elle est délimitée à l'amont par le pont de la route 153 et à l'aval par le pont du CN. La zone d'influence, comprise entre les rapides Manigance au nord et les rapides des Hêtres au sud, est le secteur directement influencé par les variations de niveau d'eau occasionnées par l'exploitation de la centrale de Grand-Mère. Quant à la zone d'influence, elle s'étend de La Tuque en amont jusqu'aux rapides des Forges en aval.

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5. Programme de consultation publique

5.1. Programme de communication d'Hydro-Québec

Cette section résume les principales informations retrouvées dans le chapitre 1.3 du volume 1 du rapport d'avant-projet produit par le promoteur concernant son programme de communication. On y retrouve notamment une liste des différents organismes contactés de même qu'un tableau synthèse résumant les enjeux, préoccupations et demandes du milieu lors des différentes tournées de communication effectuées par le promoteur.

5.1.1. Démarche de communication

Depuis la mise en marche du projet en décembre 1991, trois tournées d'information et de consultation ont été réalisées auprès du public. Une première tournée, en février 1992, se voulait très générale et avait pour but d'informer le milieu sur l'amorce des études en vue de la construction de la nouvelle centrale de même que des intentions d'Hydro-Québec. Deux variantes possibles d'aménagement ont été présentées, de même que les études technique et environnementale devant être effectuées au cours de la phase I des travaux, ainsi que les étapes de communication à venir. Une deuxième tournée, en novembre 1995, a présenté la variante d'aménagement retenue aux fins de la phase II de l'avant-projet et a permis de faire le point avec la population sur l'évolution de l'ensemble du projet. Une dernière tournée d'information réalisée en septembre 1998 avait pour but de rappeler la justification du projet, de résumer les caractéristiques de l'aménagement optimisé, de dresser un bilan des impacts et des mesures d'atténuation et de présenter les retombées économiques régionales du projet.

Trois bulletins d'information (janvier 1992, novembre 1995 et août 1998) et un feuillet d'information (août 1995) ont également été produits et distribués avant ces tournées d'information. Deux assemblées publiques (1992 et 1998) et une rencontre de presse (1998) ont également eu lieu.

Au total, une cinquantaine d'organismes ou de groupes ont été convoqués aux rencontres de communication ou ont reçu un feuillet d'information. Une douzaine de rencontres ont été organisées pour chacune des tournées et, en moyenne, une vingtaine d'organismes ou groupes ont participé à celles-ci.

Ces rencontres regroupaient des organismes, groupes et personnes concernés par le projet (ministères, municipalités, MRC, groupes économiques, groupes d'intérêt environnementaux, récréotouristiques et culturels, et les propriétaires touchés) et ont permis au promoteur d'informer les intéressés et recueillir leurs commentaires.

À chacune des étapes de communication, le promoteur a pris note des préoccupations et des demandes formulées par le milieu et qu'elle en a tenu compte dans l'orientation de l'étude, de même que dans l'établissement du projet définitif. Des demandes du milieu ont occasionné des réponses ou des engagements de la part d'Hydro-Québec.

L'entreprise mentionne également avoir été en étroit contact avec les représentants du milieu et plusieurs groupes et organismes suite à des consultations relatives aux projets de réfection de quatre aménagements hydroélectriques existants (La Gabelle, Shawinigan-2, Shawinigan-3 et La Tuque) et aux avant-projets concernant l'aménagement de deux nouvelles centrales (Rapides-des-Cœurs, Rapides-de-la-Chaudière) ou de la dérivation partielle de la rivière Mégiscane. 

5.1.2. Préoccupations et enjeux soulevés par le milieu

Les principales préoccupations des groupes et organismes consultés dans le cadre du projet concernent :

  • les retombées économiques locales;
  • la gestion des déblais d'excavation et les activités de chantier;
  • la vocation de l'ancienne centrale;
  • l'impact sur les frayères;
  • la mise en suspension de sédiments contaminés; et
  • l'ajout de lignes de transport.

Certains groupes et organismes ont également exprimé des inquiétudes selon lesquelles la nouvelle gestion hivernale de la centrale pourra créer le long des rives des bourrelets de glace qui pourraient rendre l'accès au plan d'eau plus difficile pour la pratique d'activités hivernales. Cet impact a été identifié par le promoteur comme un enjeu lié au projet. Les mesures d'atténuation mises de l'avant par le promoteur pour atténuer cet impact sont retrouvées à la section 7.6.2.

À cela s'ajoutent des préoccupations et des enjeux régionaux liés aux retombées économiques régionales et à un usage polyvalent de la rivière à des fins récréotouristiques, au moyen de l'aménagement de passes à bateaux aux installations hydroélectriques existantes et en rénovation. 

5.1.3. Engagements ou réponses d'Hydro-Québec

Dans certains cas, les informations fournies par le promoteur ont permis de dissiper les craintes et de répondre aux attentes du milieu. C'est notamment le cas des impacts sur les frayères (la perte d'habitat sera compensée), de la mise en suspension de sédiments (aucun déplacement de sédiments contaminés dû au projet), des activités de chantier (impact négligeable), de l'ajout des lignes de transport (pas de prévision à cet effet, la mise en place de nouvelles lignes étant liée à une hausse de la demande et non à l'augmentation de la puissance de la centrale) et des retombées économiques (mesures pour maximiser celles-ci au niveau local, puis régional).

Au moment de la rédaction du rapport d'avant-projet, Hydro-Québec a mentionné que les deux solutions proposées pour la gestion des déblais comportent des avantages et des désavantages aux yeux des municipalités établies en rive gauche et de la MRC du Centre-de-la-Mauricie, préoccupées par ce sujet. Hydro-Québec a donc invité ces organismes à participer aux discussions et à collaborer à l'établissement d'une solution acceptable.

Consciente de la valeur patrimoniale de la centrale existante, Hydro-Québec s'est dite prête à former un comité consultatif qui procédera à l'analyse des propositions du milieu quant à l'utilisation éventuelle de celle-ci. Hydro-Québec n'a cependant pris aucun engagement quant à la mise à la disposition du milieu de la centrale existante.

En ce qui a trait à l'utilisation récréative du plan d'eau en période hivernale, Hydro-Québec a souligné qu'un contact sera maintenu avec les usagers afin de trouver des solutions pour pallier les problèmes éventuels d'accès à la rivière. Quant aux risques additionnels pour les usagers, concernant la stabilité du couvert de glace dans le secteur des rapides des Hêtres, le promoteur compte contacter et sensibiliser la population à ce sujet et effectuer un suivi des conditions des glaces, mais il ne peut s'engager à garantir la sécurité des lieux étant donné qu'elle ne l'est pas présentement.

La demande d'installation d'une écluse pour le passage des bateaux à l'aménagement hydroélectrique de Grand-Mère s'inscrit dans une démarche plus large concernant l'ensemble des installations d'Hydro-Québec et ayant pour but de rendre la rivière navigable sur la majeure partie de son cours. Hydro-Québec n'a pris aucun engagement quant à la modification éventuelle de ses installations à ce sujet, mais elle s'est engagée à estimer les coûts d'un tel aménagement. Le promoteur indique toutefois que des projets touchant le nautisme pourront être proposés dans le cadre du Programme de mise en valeur intégrée de l'entreprise (PMVI).

5.1.4. Position des groupes et des organismes

Le promoteur mentionne qu'aucune des organisations rencontrées dans le cadre des rencontres ne s'est opposée au projet et certaines ont même signifié leur appui au projet. Il s'agit de la MRC du Centre-de-la-Mauricie, des municipalités touchées par les travaux (Grand-Mère, Saint-Georges et Lac-à-la-Tortue), des députés provinciaux des circonscriptions de Laviolette et de Trois-Rivières, du député fédéral de la circonscription de Saint-Maurice, ainsi que du président de la Corporation de gestion du développement du bassin de la rivière Saint-Maurice (CGDBR).

5.2. Consultation du public dans le cadre de la LCÉE

Une période de commentaire du public est prévue suite au dépôt du rapport d'étude approfondie à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale (ACÉE). Au cours de cette période, le public pourra consulter le document et exprimer ses opinions et préoccupations concernant les répercussions environnementales du projet.

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6. Description de l'état actuel de l'environnement

Le volume 2 du rapport d'avant-projet présente une description détaillée du milieu de même que des méthodes d'inventaire utilisées pour caractériser celui-ci alors que le chapitre 2 du volume 1 fournit une description sommaire du milieu susceptible d'être touché par le projet. La section qui suit présente un résumé des principaux éléments de l'environnement du secteur d'étude.

6.1. Milieu physique

6.1.1. Physiographie et sols

Sur le plan physiographique, la zone d'étude est située dans les contreforts des Laurentides au nord et dans les basses terres du Saint-Laurent au sud.

Dans le tronçon situé entre le barrage de Grand-Mère et les rapides Manigance, 52 % des berges subissent une érosion forte, moyenne ou faible, alors que l'érosion notée dans le reste du territoire est qualifiée de nulle étant donné qu'il s'agit de berges rocheuses ou déjà protégées. Environ quinze pour cent des berges, notamment celles constituées d'argile et de silt, sont qualifiées d'active (21 % rive droite et 8,5 % rive gauche).

Les berges retrouvées entre les barrages de Grand-Mère et Shawinigan sont également fortement sensibles à l'érosion, surtout celles situées en rive gauche où la proportion de berges sensibles atteint 33,5 %. Moins de 2 % de l'ensemble des rives présentent toutefois des signes d'instabilité.

Dans le tronçon Shawinigan-La Gabelle, plus de 80 % des berges retrouvées en rive gauche, où dominent les berges argileuses de forte pente, présentent une forte sensibilité à l'érosion (50 % pour l'ensemble du secteur). De fait, près de 21 % de ces berges sont effectivement en érosion et ce, notamment dans le secteur en aval du pont ferroviaire, dans la zone d'influence de la centrale La Gabelle.

Le sapement causé par les vagues à la base des talus et les éboulements le long des pentes sont les principaux phénomènes d'érosion observés. L'arrêt du flottage du bois, le démantèlement des estacades utilisées pour cette activité et l'augmentation concurrente de l'activité nautique, notamment en amont de l'aménagement de Grand-Mère, auront pour effet d'accroître l'érosion là où les rives sont sensibles.

6.1.2. Hydrographie

D'une superficie de 43 250 km², le bassin hydrographique de la rivière Saint-Maurice compte huit barrages (figure 3) sur le cours principal de la rivière (Rapide-Blanc, Trenche, Beaumont, La Tuque, Grand-Mère, Shawinigan-2, Shawinigan-3 et de La Gabelle), un barrage à la sortie du réservoir de tête de la rivière (barrage Gouin), ainsi que de plusieurs barrages sur les rivières Manouane et Matawin, tributaires de la rivière Saint-Maurice. Ces ouvrages font de la rivière Saint-Maurice l'un des cours d'eau les plus régularisés au monde. Le réservoir de la centrale de Grand-Mère est alimenté par les eaux de la centrale de La Tuque de même que par celles des tributaires du bassin intermédiaire compris entre ces deux sites, comprenant les rivières aux Rats, Wessonneau, Matawin et Mékinac. 

6.1.3. Couvert de glace

Dans le bief amont de la centrale de Grand-Mère, la couverture de glace se forme dès le début de l'hiver et, mis à part certaines éclaircies dans les secteurs d'eau vive en amont de Mékinac, elle couvre l'ensemble du secteur compris entre les rapides Manigance et la centrale de Grand-Mère. En aval de l'aménagement, la prise des glaces est plus lente, due à la vitesse plus élevée du courant, et la couverture progresse des rives vers le centre pour devenir éventuellement complète entre l'amont des rapides des Hêtres et l'amont du secteur de Beaurivage.

6.1.4. Qualité de l'eau

L'eau de la rivière est considérée de bonne qualité. Les municipalités de La Tuque, de Grandes-Piles, de Grand-Mère, de Saint-Georges et de Shawinigan possèdent des installations de traitement des eaux usées. Il en est de même des usines d'Abitibi-Consolidated à Grand-Mère et à La Tuque, de l'usine Belgo à Shawinigan, et de l'usine des Produits forestiers Canadien Pacifique (PCFP) à La Tuque.

6.1.5. Sédiments

L'inventaire des sédiments retrouvés dans le bief amont de la centrale démontre que les matériaux fins sont présents près des rives alors que les plus grossiers se trouvent vers le centre de la rivière.

Les analyses de sédiments fins réalisées dans ce secteur n'ont démontré aucune contamination sévère pour les paramètres organiques et inorganiques analysés. Une seule station d'échantillonnage, située dans une petite baie à proximité du pont de la route 153, où un ancien égout sanitaire se déverse encore occasionnellement, a démontré quelques dépassements de critère de sécurité pour le plomb et le mercure. La mise en service de la nouvelle centrale n'occasionnera toutefois pas la remise en suspension de ces sédiments.

Dans le bief aval, le lit de la rivière est rocheux ou constitué de sable ou de gravier.

6.2. Milieu biologique

6.2.1. Faune ichtyenne et habitat du poisson

Vingt-six espèces de poissons ont été inventoriées entre Shawinigan et La Tuque. Parmi les espèces d'intérêt pour la pêche, on retrouve le doré jaune, la perchaude, l'achigan à petite bouche, le grand brochet, l'omble de fontaine, le meunier noir et le meunier rouge. Ces espèces sont retrouvées tant en amont qu'en aval de l'aménagement de Grand-Mère. Des captures occasionnelles d'ouananiches et de maskinongés ont également été réalisées en aval de la centrale de Grand-Mère.

L'ouananiche et l'anguille d'Amérique sont les deux seules espèces migratrices susceptibles d'être retrouvées dans le secteur d'étude.

Les ouananiches, introduites dans certains plans d'eau en amont de Grand-Mère (réservoir Taureau, lacs Mékinac, lac Inman et Dunbar) peuvent quitter occasionnellement ces plans d'eau et se retrouver dans la rivière Mékinac et Matawin avant de se retrouver dans la rivière Saint-Maurice. La présence de cette espèce non indigène est toutefois qualifiée d'occasionnelle en aval de l'aménagement de Grand-Mère.

Il existe des informations à l'effet que l'anguille peut se retrouver dans le bief aval de la centrale de Grand-Mère. Sa présence à ce site est toutefois considérée exceptionnelle étant donné que l'espèce doit franchir une chute d'une hauteur de 44 m au complexe de Shawinigan, situé 16 kilomètres en aval, avant de rejoindre ce secteur. De plus, aucune pêche expérimentale n'a permis de confirmer à ce jour la présence de cette espèce entre ces deux barrages et sa présence au-delà de l'aménagement de Grand-Mère demeure inconnue. L'existence d'une série de chutes et de cascades importantes aux sites des aménagements hydroélectriques actuels a sans doute restreint, de tout temps, la migration de cette espèce dans le secteur.

La population d'achigan à petite bouche retrouvée entre la centrale et les rapides des Hêtres est considérée dans un état précaire, car son abondance et le rendement de pêche sportive y sont relativement faibles. Des aménagements fauniques pour favoriser la production de cette espèce ont été réalisés en 1997 par GDG Conseil inc. dans le secteur Beaurivage, soit le tronçon compris entre le pont du CN et les rapides des Hêtres. Ces aménagements sont constitués de deux à trois gros blocs, requis pour bloquer le courant, et de graviers de 20 à 45 mm de diamètre, nécessaires pour la construction des nids.

Des inventaires réalisés entre la centrale de Grand-Mère et les rapides des Hêtres ont permis de confirmer la présence de trois frayères en eau vive et de deux frayères en eau calme. Une douzaine d'herbiers aquatiques, présentant des habitats du poisson reconnus ou potentiels, ont de plus été identifiés entre les barrages de Grand-Mère et de La Gabelle (GDG, 1997).

Dans la zone d'étude locale, l'achigan à petite bouche utilise comme aire de frai une surface d'au moins 150 m² d'un haut-fond situé au pied du barrage-poids gauche. Le meunier noir utilise également ce haut-fond (1 547 m²) de même qu'un autre situé près de la rive gauche, en aval de la pointe à Simard (10 300 m²), comme aire de reproduction. La perchaude utilise une petite arbustaie riveraine située en rive droite en face de la pointe à Simard, à l'extrémité nord de la plage où se trouve l'émissaire industriel. Compte tenu des conditions hydrauliques qui prévalent à ce site, cet habitat a toutefois peu de valeur dans les conditions actuelles et les nouvelles conditions prévues n'apporteront pas de changements notables à cette situation. De plus, bien qu'aucune aire de frai n'ait été identifiée pour le doré, il demeure possible que cette espèce fraie dans la zone d'étude locale. 

6.2.2. Avifaune

Avec plus de 118 espèces d'oiseaux observés dans la zone d'étude étendue et ses abords, le secteur à l'étude possède une diversité de l'avifaune relativement élevée. Les données de l'Atlas des oiseaux nicheurs (Gauthier et Aubry, 1995) indiquent la nidification confirmée d'une cinquantaine d'espèces. En milieu riverain, la faible superficie des milieux humides, les rives peu découpées et les perturbations d'origine anthropique semblent conférer peu de valeur aux habitats pour la sauvagine et les oiseaux de rivage. Aucun habitat particulier ou exceptionnel n'a été identifié par le promoteur dans la zone d'étude locale. 

6.2.3. Végétation riveraine et aquatique

Les herbiers aquatiques constituent le type de milieu humide le plus répandu du territoire à l'étude. Des rapides Manigance à la centrale de La Gabelle, ces milieux occupent environ 198 ha de superficie. C'est dans les biefs amont des centrales de Grand-Mère (118 ha) et de Shawinigan (35 ha) qu'ils sont les plus abondants.

Le groupement à vallisnérie d'Amérique domine largement les communautés végétales des herbiers aquatiques échantillonnés entre le pont de la route 153 et les rapides des Hêtres. On y retrouve également l'élodée du Canada, l'éléocharide aciculaire et le potamot émergé, toutes des espèces vivaces qui s'enracinent profondément dans le substrat. Ces plantes se distribuent uniformément entre les profondeurs de 0,5 à 2 m.

Les herbiers émergents (marais), retrouvés à des profondeurs variant entre 0 et 0,5 m, sont principalement composés de gaillet palustre et de zizanie aquatique, accompagné de renouée de Pennsylvanie. La prairie humide et le marécage arbustif occupent la portion de la plaine inondable exondée par l'étiage estival. Le phalaris roseau ainsi que l'aulne et le saule dominent respectivement ces habitats.

La zone d'étude locale comporte trois herbiers aquatiques et deux marais (herbiers émergents) dont un est situé en rive gauche en amont du déversoir existant et l'autre au futur site de déposition des déblais d'excavation. La prairie humide et le marécage arbustif semblent toutefois faiblement représentés dans les zones d'étude locale et étendue en aval de l'aménagement de Grand-Mère. Dans la zone d'influence aval, le développement des arbustaies et des herbiers aquatiques est plutôt limité, compte tenu des substrats rocheux qui bordent la rivière et les pentes prononcées des berges.

6.3. Milieu humain

6.3.1. Profil socio-économique et sociodémographique

Le territoire d'étude est presque entièrement situé dans la MRC du Centre-de-la-Mauricie qui regroupe une quinzaine de municipalités dont dix longent les rives du Saint-Maurice. Les villes les plus populeuses sont Shawinigan, Shawinigan-Sud, Grand-Mère et Saint-Georges. La MRC se distingue de l'ensemble du Québec par des secteurs primaire et secondaire plus développés et un secteur tertiaire qui, bien qu'en pleine croissance, est moins important. Le taux de chômage est élevé, soit de l'ordre de 18 %. Aucune communauté amérindienne n'est retrouvée dans le territoire à l'étude. Trois communautés, soit les réserves de Weymontachie, d'Obedjiwan et de Manouane, occupent des territoires situés à l'extérieur du territoire d'influence du projet. 

6.3.2. Récréotourisme

Le parc national de la Mauricie, le parc régional des Chutes-de-Shawinigan et le secteur de Saint-Jean-des-Piles-Grandes-Piles sont les principaux pôles récréotouristiques de la région. La rivière Saint-Maurice, utilisée au cours de l'été 1996 par plus de 15 000 adeptes de la navigation de plaisance (bateau à moteur, canotage, etc.), est l'hôte d'un événement annuel majeur, soit la Classique internationale de canots de la Mauricie. Le démantèlement des estacades permettant d'acheminer le bois aux compagnies papetières a rendu la rivière complètement accessible pour la navigation de plaisance entre le barrage de Grand-Mère et les rapides Manigance. La baie aux environs du golf de Grand-Mère, la pointe à Desaulniers et la pointe à Simard, de même que la zone située immédiatement en aval de la centrale sont des secteurs de pêche fréquentés en période estivale.

En hiver, la pêche sous la glace est pratiquée dans plusieurs secteurs de la zone d'étude étendue. Trois secteurs de pêche ont été dénombrés par le promoteur en 1996. Il s'agit de la baie située en rive droite en amont immédiat de l'auberge de Grand-Mère et des baies en aval du village de Saint-Roch-de-Mékinac et de l'île aux Pins. La rivière est également utilisée par des amateurs de motoneige et de véhicules tout-terrain (VTT). Des sentiers balisés ou des sentiers spontanés donnent accès à la rivière dont un aboutit en rive gauche en amont du déversoir existant. La piste no 3 du réseau national de motoneige traverse le Saint-Maurice au nord du barrage de La Gabelle alors que les pistes provinciales no 347 et no 318 situées en amont du barrage de Grand-Mère figurent parmi les pistes de motoneige les plus utilisées dans la zone d'étude étendue. En 1996, on a estimé à plus de 13 500 le nombre de visites-personnes entre la centrale de La Gabelle et les rapides Manigance en période hivernale.

6.3.3. Utilisation du sol

Le secteur immédiat de la municipalité de Grand-Mère offre peu d'espaces encore inoccupés. On y observe les installations industrielles de la papetière d'Abitibi-Consolidated, une aire d'extraction de Construction et Pavage Maskimo, une partie de la propriété du CN, ainsi qu'une zone résidentielle. Il est à noter que l'accès à la centrale de Grand-Mère se fait par la propriété de la papetière. En rive gauche, la majorité des terrains bordant la rivière entre la voie ferrée et le pont de la route 153 sont la propriété d'Hydro-Québec. Les Entreprises Grand-Mère-Est possèdent des terrains à proximité de la route 153 alors que la portion des terres située à Lac-à-la-Tortue appartient à Excavation Gaston Trépanier. 

6.3.4. Archéologie et patrimoine

Six zones, comprises dans la zone d'étude locale, présentent un potentiel archéologique qui risque d'être touché par les travaux. L'inventaire n'a toutefois permis de révéler aucun indice d'occupation préhistorique. Sur le plan historique, les structures ou les artéfacts repérés dans la zone des travaux présentent peu d'intérêt sur le plan industriel, architectural ou patrimonial.

Selon une étude réalisée par Hydro-Québec, la centrale hydroélectrique de Grand-Mère, dont l'architecture est inspirée de la cathédrale gothique de Sainte-Cécile d'Albi en France, est placée parmi les trois installations les plus intéressantes, sur le plan patrimonial, des quelque 90 ensembles hydroélectriques évalués. La valeur patrimoniale n'est pas seulement liée à ce bâtiment car les ouvrages de retenue et de contrôle comptent toujours parmi les plus importants grands barrages de béton à composantes multiples à avoir été construits au Québec. Plusieurs de ses composantes électriques et mécaniques ont de plus un intérêt patrimonial exceptionnel, très élevé ou élevé.

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7. Effets prévus, importance des effets et mesures d'atténuation

Le chapitre 5 du volume 1 du rapport d'avant-projet décrit les modifications du milieu physique occasionnées par le projet de même que les impacts prévisibles sur le milieu naturel et humain. Le chapitre 5 et l'annexe A présentent la méthode d'analyse et d'évaluation des impacts utilisée par le promoteur alors que l'annexe B du même document contient la liste complète des mesures d'atténuation mentionnées dans le chapitre 5 dudit rapport

La section qui suit présente un résumé des modifications du milieu de même qu'une évaluation des principaux effets environnementaux causés par le projet, y compris ceux causés par les accidents et les défaillances ainsi que les effets cumulatifs. Les principales mesures d'atténuation sont également mentionnées.

Il est à noter que l'évaluation des impacts réalisée par le promoteur est basée sur un scénario extrême dans lequel le débit de pointe de la nouvelle centrale de Grand-Mère variera de 200 m³/s à 1 040 m³/s tous les jours de l'hiver. Les répercussions les plus importantes se produiront surtout durant les premières années suivant la mise en service alors que le promoteur ajustera son mode d'exploitation. 

7.1. Méthodologie d'évaluation des impacts

Le promoteur a évalué les impacts avant et après l'application de mesures d'atténuation, pour chacune des composantes du milieu naturel et humain visées. Toutefois, aucun impact résiduel n'a été identifié pour les éléments du milieu physique; on parle plutôt de modifications de l'élément et non pas d'impact à ce sujet. La méthode de prévision des impacts retenue par le promoteur consiste à cerner d'abord les modifications du milieu physique puis à évaluer les impacts sur les éléments vivants du milieu, soit les humains, la faune et la flore. L'application de mesures d'atténuation appropriées à l'élément visé permet alors d'obtenir un impact résiduel le plus faible possible.

L'importance de l'impact, qui peut être qualifiée de faible, moyenne, ou forte, a été évaluée à partir d'une grille d'évaluation comportant trois descripteurs, soit la durée, l'étendue et l'intensité.

Cette nomenclature diffère de celle utilisée pour définir les effets environnementaux d'un projet en vertu de la LCÉE où un effet négatif doit être défini soit comme important, non important ou indéterminé.

Dans son rapport complémentaire, le promoteur a déterminé qu'un impact fort correspond à un effet important tel que défini selon la terminologie de la LCÉE alors qu'un impact moyen ou faible correspond à un effet non important.

Le MPO est en accord avec une telle approche.

Le tableau 2 présente le bilan des impacts réalisé par le promoteur pour l'ensemble des éléments de l'environnement susceptibles d'être touchés par le projet. Les commentaires du MPO relatifs à ces évaluations sont retrouvés dans les sections suivantes. Certains éléments de l'environnement pour lesquels le projet n'occasionne que des effets environnementaux non importants n'ont pas été repris dans le résumé présenté ci-dessous (qualité de l'eau, qualité de l'air, ambiance sonore, etc.).

Tableau 2 : Bilan des impacts réalisé par le promoteur pour les différents éléments de l'environnement touchés par le projet
Tableau : Bilan des impacts réalisé par le promoteur pour
Source : Hydro-Québec. Nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère, 1998, tableau 5.5.

7.2. Modifications du milieu physique occasionné par le projet

Le principal impact du projet sur le milieu physique concerne la modification du régime des glaces, occasionnée par l'exploitation des nouveaux ouvrages en période hivernale. Des changements sont également attendus sur le plan hydrologique et hydrodynamique ainsi qu'au niveau du profil du sol et de la bathymétrie.

Le marnage, dû à la variation quotidienne du débit en période hivernale, fera en sorte de créer des fissures, des bourrelets et des épanchements d'eau, dans la couverture de glace le long des berges, qui pourront nuire à l'accessibilité du cours d'eau et à la pêche blanche. La modification du mode de gestion hydraulique hivernale augmentera également le risque de dévalement des glaces et fera en sorte que les couvertures de glace entre la centrale de Grand-Mère et l'île Frigon de même qu'entre le complexe de Shawinigan et la chute à Madeleine seront impropres à la circulation à divers degrés étant donné la rugosité de leur surface et des risques de dévalement. L'impact important attendu sur le régime des glaces de même que les mesures d'atténuation qui y sont associées seront discutés dans la section 7.6.2 du présent rapport traitant des effets des variations de l'environnement sur les conditions socio-économiques.

Les modifications du régime hydrologique feront en sorte que le haut-fond situé en aval du nouveau régulateur sera totalement érodé suite au passage des crues moyennes. Environ 50 000 m³ de sable de cailloux et de blocs seront emportés. Les sédiments grossiers se déposeront dans la zone d'étude locale alors que des sédiments plus fins pourront se déposer plus en aval dans la zone d'étude étendue. L'impact, considéré comme non important pour la sédimentologie, aura toutefois des répercussions sensibles pour l'ichtyofaune. Cet aspect sera traité à la section 7.3.1 retrouvée ci-dessous.

De faibles impacts sont attendus en ce qui concerne l'érosion des berges (détachement des glaces et vitesse du courant), car le projet ne devrait affecter que quelques talus déjà fortement érodés sans en déstabiliser de nouveaux. Un suivi sera d'ailleurs réalisé à ce sujet et des actions de stabilisation seront prises dans le cas où il y aurait recul des berges et présence d'éléments sensibles à protéger. 

7.3. Effets du projet sur les composantes de l'environnement

7.3.1.  Faune ichtyenne et habitat du poisson

Les modifications du régime hydrologique causées par l'orientation du nouvel évacuateur de crue de même que par le marnage attribuable au nouveau mode de production de pointe de la centrale en hiver sont les principaux facteurs susceptibles d'occasionner des impacts sur l'habitat du poisson. C'est par l'action érosive des glaces sur le fond, les berges et la végétation riveraine et aquatique que les effets du nouveau mode d'exploitation de l'aménagement pourront se faire sentir.

Dans la zone d'étude locale, les travaux de batardage et d'excavation en eau occasionneront le délaissement de la frayère située près du barrage-poids gauche. La mise en service des nouveaux ouvrages régulateurs occasionnera des modifications hydrodynamiques importantes dans le milieu. Un haut-fond constitué de cailloux et de blocs dans une matrice de sable, situé en aval du barrage-poids gauche, subira des dommages importants lors du passage de la première crue moyenne. Au total, un volume de 30 000 m³ de sédiments en place sera ainsi déplacé. La frayère à achigan à petite bouche (150 m²) et à meuniers (1 547 m²), présente à ce site, disparaîtra vraisemblablement après la mise en exploitation de la nouvelle centrale. De plus, la frayère située en aval de la pointe à Simard subira un ensablement sur une superficie d'environ 3 100 m², soit 30 % de sa superficie actuelle.

La majorité des sédiments ainsi déplacés sédimenteront dans la zone d'étude locale. La partie la plus fine du sable ira toutefois se déposer, à un rythme lent (1 mm par an), dans les sections d'eau calme ou plus profonde de la zone d'étude étendue, où sédimentent actuellement les sables transportés par la rivière en crue. De plus, le projet n'occasionnera pas de modification des zones de sédimentation et d'érosion qui existent présentement dans ce secteur. Les possibilités d'ensablement de frayères ou d'aires d'alevinage potentielles, retrouvées dans les herbiers aquatiques, sont de ce fait jugées très faibles.

De plus, les frayères et les aires d'alimentation se trouvant dans le bief aval de la zone d'étude étendue, sont situés dans des secteurs abrités et seront par conséquent moins affectées par l'érosion des berges, occasionnées par les mouvements de la couverture de glace associés au nouveau mode d'exploitation hivernal. Les herbiers aquatiques ne devraient pas être touchés par ce phénomène compte tenu de leur profondeur d'implantation. Les herbaçaies riveraines, milieu susceptible d'abriter des sites de frai pour la perchaude, pourront toutefois subir l'action des glaces et être remplacés par des plantes herbacées plus aptes à s'adapter à ces conditions.

Un suivi des herbiers aquatiques et des milieux riverains permettra de vérifier l'impact du projet sur ces milieux et de mettre en œuvre, le cas échéant, les mesures d'atténuation ou de compensation appropriées si des pertes d'habitats du poisson sont observées.

Les aménagements pour l'achigan à petite bouche, retrouvés dans le secteur compris entre la Pointe aux Ormes et les rapides des Hêtres ne seront vraisemblablement pas affectés par la nouvelle gestion hivernale de la centrale Grand-Mère, étant donné que ces aménagements sont conçus pour résister aux débits moyens de printemps (2 600 m³/s) qui sont plus élevés que le débit de pointe hivernal (1 040 m³/s) qui sera généré par la nouvelle centrale.

La mise en place de deux remblais en aval de la centrale existante occasionnera un empiétement d'environ 5 700 m² en milieu aquatique. Ces structures seront toutefois situées dans un secteur de peu d'intérêt pour la faune aquatique compte tenu de la vitesse d'écoulement qui prévaut actuellement à la sortie de la centrale existante. Les matériaux meubles utilisés pour ces enrochements pourront de plus servir de support et d'abris pour la faune aquatique lorsque les conditions hydrologiques du secteur deviendront plus favorables, à la suite de la mise en service de la nouvelle centrale. Le creusage des canaux d'amenée et de fuite occasionneront une augmentation du milieu aquatique d'environ 45 000 m².

L'aménagement du chemin d'accès aux ouvrages occasionnera toutefois un empiétement en eau d'environ 300 m² dans un petit marais situé au fond de la baie, en rive gauche, près du pont de la route 153. Ce site, localisé près d'une zone d'alevinage reconnue, peut être utilisé comme aire de frai par certaines espèces de poissons, dont la perchaude.

Au total, environ 4 800 m² de frayères connues et environ 300 m² d'aire de frai potentielle pour le poisson seront détruits de façon permanente à la suite de la réalisation du projet.

L'impact de la construction et de l'exploitation du projet sur l'habitat du poisson est considéré comme important et nécessite une autorisation 35(2) en vertu de la Loi sur les pêches (LP). En vertu du principe d'aucune perte nette préconisé par la Politique de gestion de l'habitat du poisson du MPO, ladite autorisation ne sera délivrée que si les pertes d'habitats sont compensées.

La mesure de compensation qui sera réalisée consiste en la création d'une frayère multispécifique (pour l'achigan à petite bouche, le doré jaune et les meuniers) en aval du barrage-poids gauche, et d'une aire de frai pour la perchaude dans le petit marais situé en rive gauche de la rivière, dans le bief amont.

La frayère créée en aval immédiat du barrage de Grand-Mère (environ 9 000 m²) sera composée de substrats rocheux de diamètres variables : entre 5 et 30 cm pour les besoins du doré et des meuniers; gros blocs de plus de 80 cm et particules fines d'environ 5 cm pour l'achigan à petite bouche. Le plateau formant cette nouvelle aire de frai sera creusé de cinq sillons rectilignes afin de fournir une meilleure variété de profondeur et de vitesse d'écoulement sur l'ensemble du site.

La frayère créée en amont de l'aménagement de Grand-Mère sera réalisée par la plantation d'arbustes (aulnes) à la base du remblai du chemin d'accès situé dans le marais, à une cote qui permettra leur submersion au printemps. Cet aménagement pourra être utilisé par la perchaude qui fraie dans de tels milieux.

Différentes mesures permettront de plus d'atténuer l'impact des travaux sur la qualité de l'eau et l'utilisation d'explosifs sera conforme aux directives visant la protection de la faune ichtyenne (Wright et Hopky, 1998).

7.3.1.1. Passe migratoire et dispositifs de retenue des poissons

Le paragraphe 20(1) de la LP indique que « le ministre peut décider qu'il est nécessaire que, dans l'intérêt public, certains obstacles soient munis d'une échelle à poisson ou passe migratoire ». La présence d'espèces migratrices dans un cours d'eau où il y a obstacle au déplacement du poisson peut motiver l'installation d'une telle structure.

L'anguille d'Amérique et l'ouananiche sont deux espèces migratrices susceptibles d'être retrouvées au site de Grand-Mère. L'incertitude liée à la présence d'une population d'anguilles dans le bief aval de l'aménagement et son absence en amont, le caractère occasionnel lié à la présence d'une population non indigène, soit l'ouananiche, dans le bief aval du même aménagement, et l'absence d'une préoccupation particulière à ce sujet de la part des autorités québécoises, gestionnaire de la ressource ichtyenne, font en sorte que, dans l'état actuel de nos connaissances, ces éléments ne justifient pas l'aménagement d'une passe migratoire permettant la montaison de ces espèces.

Par ailleurs, aucun dispositif de retenue de poissons n'a été prévu pour l'aménagement de Grand-Mère par le promoteur en raison : 1) de l'absence à ce site d'espèces pouvant effectuer des migrations; 2) de contraintes techniques liées aux forts débits de la centrale (débit d'équipement de 275 m³/s) occasionnant un colmatage très rapide de ces structures; et 3) à l'absence d'autres mesures d'évitement jugées vraiment efficaces à l'heure actuelle.

Le promoteur indique que l'impact de l'effet de l'entraînement des poissons dans les turbines est considéré comme faible étant donné qu'il n'y a pas d'espèces migratrices au site de l'aménagement. Les espèces résidentes quant à elles sont moins susceptibles d'être retrouvées à proximité des prises d'eau, car leur déplacement n'est pas lié à un phénomène de dévalaison inscrite dans leur cycle vital. On rapporte toutefois que des espèces résidentes, souvent des fretins, peuvent être entraînées dans les turbines.

Étant donné que les turbines de type Kaplan qui seront installées génèrent en moyenne moins de mortalité que les turbines de type Francis présentes actuellement, le nouvel aménagement n'occasionnera vraisemblablement pas un impact plus important que ce qui existe déjà en ce qui concerne la mortalité des poissons. L'impact du projet peut donc être considéré comme non important à ce sujet. 

7.3.2. Avifaune

Les impacts appréhendés sur l'avifaune forestière ne se manifesteront que dans la zone d'étude locale et sont essentiellement liés à la perte d'environ 15,5 ha de milieux forestiers requis pour la construction des nouveaux ouvrages (centrale et poste de départ), la mise en place des installations de chantier, la gestion des déblais de roche, et l'aménagement de chemins d'accès et d'emprises des lignes de transports d'énergie. Cette perte de couvert forestier est considérée par le promoteur comme relativement faible pour l'avifaune compte tenu de l'abondance de ce type d'habitat dans la région.

De plus, la faible abondance de milieux humides et la présence de rives escarpées font en sorte que la sauvagine est peu présente dans la zone d'étude locale et étendue. Considérant que les herbiers aquatiques présents dans la zone d'étude étendue seront vraisemblablement peu altérés par le déplacement des glaces, le promoteur mentionne qu'il y a tout lieu de croire que l'impact du projet sur la sauvagine sera également faible.

Le promoteur considère qu'aucun impact ne peut être attendu sur les colonies d'hirondelles des sables, étant donné que le secteur de la sablière susceptible d'abriter ces populations ne sera pas touché par le projet.

Selon le promoteur, l'effet du projet sur l'avifaune peut donc être considéré comme étant peu important.

Toutefois, étant donné que l'étude d'Hydro-Québec ne permet pas de connaître précisément les espèces présentes dans la zone affectée par les travaux (nouveaux ouvrages, chemins d'accès, lignes électriques et sites de déblais) et d'évaluer les impacts du projet sur l'avifaune, Environnement Canada demande que le promoteur réalise une série d'inventaires sur le terrain avant le début des travaux de manière à bien évaluer cet impact. Ces inventaires devront être réalisés au cours du mois de juin précédant les travaux.

Afin de minimiser les impacts sur la faune avienne, le promoteur devra limiter le plus possible le déboisement et réaliser les travaux (déboisement et aménagement des chemins d'accès, des sites de déblais et des lignes électriques) en dehors de la période de nidification des oiseaux (juin et juillet).

L'impact du projet sur l'avifaune pourra être considéré non important dans la mesure où le promoteur respecte les mesures d'atténuation ci-dessus mentionnées et que les résultats des inventaires qui seront réalisés ne feront état d'aucune espèce en difficulté ou d'intérêt particulier sur les plans socio-économique, culturel et scientifique.

Si, à la lumière de ces inventaires, on constate la présence de telles espèces, le promoteur devra alors proposer des mesures d'atténuation ou de compensation appropriées qui devront être jugées satisfaisantes par Environnement Canada. 

7.3.3. Végétation riveraine et aquatique

Le mouvement vertical des glaces, engendré par le nouveau mode de gestion hivernal proposé, n'est vraisemblablement pas susceptible d'occasionner d'effets environnementaux importants sur la végétation riveraine et aquatique.

Les espèces arbustives formant le pied de l'arbustaie riveraine pourront être altérées par le mouvement des glaces ce qui favorisera à long terme l'établissement d'espèces herbacées plus tolérantes aux variations du niveau d'eau.

Les plantes retrouvées dans la prairie humide et les herbiers émergents sont également susceptibles d'être affectées par l'érosion des glaces. Un tel impact peut survenir au printemps, lorsque la glace de rive se détache sous l'effet des vents, des tempêtes et des vagues et emporte des sédiments et une partie du système racinaire des plantes soudées à celle-ci. Un tel phénomène est déjà observable à chaque printemps dans la rivière Saint-Maurice et ne sera pas, selon le promoteur, amplifié par la nouvelle gestion hivernale proposée.

La profondeur d'enracinement des espèces retrouvées dans les herbiers aquatiques fera en sorte que ces milieux seront vraisemblablement peu touchés par le projet. Une étude réalisée dans le secteur de Gentilly indique que l'épaisseur des sédiments arrachés par les glaces demeure probablement faible en comparaison de la profondeur des plantes vivaces.

L'aménagement du chemin d'accès aux ouvrages occasionnera un empiétement de 0,03 ha d'un marais de 1,2 ha situé au fond de la baie en rive gauche en amont du déversoir existant alors que l'utilisation d'un site de dépôt des déblais d'excavation occasionnera le remblaiement d'un ancien marécage et d'un étang artificiel (0,5 ha) situé dans une sablière.

L'impact du projet sur la végétation riveraine et aquatique est considéré non important. Un suivi permettra de vérifier la justesse de ces prévisions .

7.3.3.1. Politique fédérale sur la conservation des terres humides

La politique fédérale sur la conservation des terres humides (PFCTH) a pour principal objectif de favoriser la conservation des terres humides en vue du maintien de leurs fonctions écologiques et socio-économiques pour le présent et pour l'avenir. La politique veut qu'il n'y ait aucune perte nette des fonctions des terres humides : 1) sur des terres et dans des eaux fédérales, 2) dans les secteurs influencés par la mise en œuvre de programmes fédéraux où la perte ou la dégradation des terres humides a atteint des proportions critiques; et 3) dans les secteurs où les activités fédérales influencent des terres humides désignées d'importance écologique ou socio-économique pour une région.

Les terres humides affectées par le projet de Grand-Mère ne rencontrent aucune des conditions ci-dessus mentionnées. Le promoteur respecte toutefois dans l'ensemble l'esprit de la Politique puisqu'il indique sa démarche ayant trait : 1) à l'évitement de tels milieux, 2) à l'atténuation des impacts inévitables, et 3) à la compensation des impacts résiduels, le cas échéant.

Petit marais en amont du barrage

L'analyse démontre que le promoteur a tenté d'éviter le plus possible l'empiétement du chemin d'accès dans le petit marais situé au sud de la route 153, mais que cet empiétement s'est révélé inévitable.

Pour ce qui est des mesures d'atténuation, le promoteur compte limiter la circulation dans ce secteur, effectuer un déboisement manuel du secteur, et installer un ponceau sous le chemin d'accès qui permettra de ne pas diminuer les apports d'eau du ruisseau qui alimente ce marais.

Il y aura de plus, plantation d'aulnes dans le bas du remblai du chemin d'accès de manière à favoriser le frai de la perchaude dans ce secteur. Cette mesure de compensation est jugée compatible avec le type d'habitat faunique potentiel du milieu et avec la fonction écologique du marais touché.

Pour ce qui est des autres fonctions potentielles (production de ressources renouvelables, habitats d'autres espèces fauniques, stockage de carbone organique, approvisionnement et épuration d'eau, conservation des sols, possibilités récréotouristiques, valeur scientifique, valeur esthétique), la petitesse du secteur touché (0,03 ha), fait en sorte que l'intensité de l'impact est nécessairement faible, surtout en bordure d'un cours d'eau de l'échelle du Saint-Maurice. Le MPO est d'accord avec cette argumentation.

Marécage inondé et étang dans le site de dépôt des déblais

L'analyse démontre que le choix de la zone de dépôt de déblais excédentaires de roches dans la sablière, comportant un marécage inondé et un étang (0,5 ha), constitue une solution de moindre impact comparativement à l'option d'entreposage en bordure de la rivière, étant donné la valeur des habitats qui y sont retrouvés.

Le promoteur indique qu'il a évité le remblayage du secteur nord de la sablière où l'on retrouve déjà des marécages arbustifs. La partie la plus à l'ouest de ces marécages sera toutefois remblayée. Ce petit marécage a déjà été altéré il y a quelques années à la suite de l'aménagement d'un chemin d'accès qui a bloqué le drainage naturel et augmenté le niveau d'eau dans celui-ci. La présence de végétation aquatique immergée et émergente à certains endroits fait que ce milieu peut avoir encore une fonction comme habitat faunique, même dans son état dégradé actuel. Ce milieu posséderait vraisemblablement peu d'autres fonctions. Il est à noter que ce marais n'est pas en communication avec la rivière Saint-Maurice.

La possibilité de préserver cette zone a été envisagée, mais elle n'a pas été retenue étant donné que sa préservation ferait en sorte que cette zone se retrouverait complètement ceinturée de talus de plus de 15 m de hauteur une fois l'aménagement de l'aire de dépôt terminé. Il en résulterait alors une excavation complètement isolée et de peu d'intérêt pour la faune.

Concernant les mesures d'atténuation applicables, le promoteur indique qu'il a tenté de minimiser le plus possible l'impact sur les terres humides et qu'il compte végétaliser la portion de talus aménagé qui bordera ces marécages, avec des arbustes qui feront une transition naturelle entre la zone des déblais et le milieu environnant. Des mesures additionnelles pourront également être proposées à la lumière des résultats de l'inventaire des oiseaux qui sera réalisé au cours du printemps 1999.

L'étang artificiel qui s'est constitué à la suite de l'excavation de sable sous le niveau de la nappe phréatique constitue un milieu perturbé et n'a fait l'objet d'aucune mesure d'atténuation ou de compensation particulière.

L'ensemble des autres terres humides

Tel que mentionné en début de section, les possibilités d'affecter les marais et milieux humides riverains le long du Saint-Maurice sont faibles. Un programme de suivi permettra de vérifier cette évaluation et d'atténuer ou de compenser les impacts, le cas échéant. Compte tenu du faible impact attendu à ce sujet, aucune mesure d'atténuation ou de compensation n'a donc été élaborée pour l'instant.

L'impact du projet sur les terres humides est jugé non important dans la mesure où le promoteur respecte les mesures d'atténuation ci-dessus mentionnées et que les résultats des inventaires de l'avifaune qui seront réalisés ne feront état d'aucune espèce en difficulté ou d'intérêt particulier sur les plans socio-économique, culturel et scientifique.

7.4 Effets des changements de l'environnement sur le patrimoine physique et culturel

L'impact du projet sur le potentiel archéologique peut être considéré comme non important, étant donné qu'aucun indice d'occupation préhistorique n'a été relevé et que les structures ou artéfacts relevés présentent peu d'intérêt sur le plan industriel, architectural ou patrimonial.

Dans le cas où des vestiges seraient mis au jour au cours du terrassement, des dispositions seront prises afin de protéger le site et les travaux seront suspendus jusqu'à ce que le ministère de la Culture et des Communications du Québec ait donné l'autorisation de les poursuivre. De plus, tel que le prévoit le Règlement sur la recherche archéologique, les artéfacts recueillis seront entreposés au Laboratoire d'archéologie du ministère de la Culture et des Communications du Québec.

La construction du nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère nécessitera toutefois l'arasement de l'évacuateur de crue et du déversoir existant ce qui fait en sorte qu'il y aura disparition d'une grande partie du plus grand barrage du Saint-Maurice. L'intérêt patrimonial et technologique des lieux sera également affaibli par la construction des nouveaux ouvrages à côté des éléments conservés de l'aménagement existant et suite aux activités visant à désaffecter, à démanteler et à retirer certaines composantes ou appareillages de la centrale. La désaffectation occasionnera par le fait même une perte de fonction de l'installation existante.

Selon l'évaluation du promoteur, l'importance de l'impact du projet sur le patrimoine bâti et technologique est considérée comme forte (importante au sens de la LCÉE) en raison de la perte de fonction du bâtiment et de la démolition des ouvrages d'évacuation. Il indique toutefois que l'arasement des ouvrages d'évacuation constitue une perte moins importante au regard du patrimoine bâti et technologique régional que la désaffectation de la centrale.

Si on se réfère à la définition des termes utilisés par le promoteur pour analyser les impacts du projet, il est indiqué qu'un impact est qualifié de forte intensité si, tel que c'est le cas pour la désaffectation de la centrale de Grand-Mère, elle affecte ou limite de manière importante et irréversible l'usage d'une composante. En tenant compte de la valeur de la composante et de l'étendue et de la durée de l'impact, l'utilisation de la grille de détermination de l'importance des impacts conduit à un impact fort et ce, malgré l'adoption de différentes mesures d'atténuation. Selon la méthodologie utilisée, la perte de fonction de l'ancienne centrale ne peut en effet être atténuée.

Le patrimoine bâti et technologique devra faire l'objet de mesures d'atténuation spécifiques visant à préserver sa valeur.

Différentes mesures d'atténuation ont été proposées par le promoteur afin de protéger et de mettre en valeur le patrimoine bâti, technologique et historique. Les principales sont les suivantes :

  • favoriser la conservation in situ de certaines pièces d'équipement et d'appareillage en fonction de leur intérêt patrimonial ou les entreposer de manière appropriée le cas échéant. Le promoteur a ainsi prévu de conserver une quarantaine de composantes de la centrale existante qui présentent un intérêt au sein de sa collection;
  • enregistrer les opérations de démantèlement d'un équipement ou d'une installation patrimoniale (photographies et notes techniques) et prises de photo aérienne des évacuateurs de crues et du déversoir au cours de leur arasement;
  • favoriser un usage polyvalent du bâtiment qui altérera le moins possible la qualité architecturale du lieu;
  • favoriser une intégration architecturale des anciens et des nouveaux éléments; et
  • former un comité, constitué de représentants d'Hydro-Québec et du milieu, qui conviendra de la réutilisation du bâtiment existant et d'un mode de mise en valeur de l'appareillage désaffecté, ce qui contribuera à préserver le patrimoine industriel de la région.

En plus de ces mesures d'atténuation, Parcs Canada recommande de commanditer une production vidéo qui illustrerait le fonctionnement complet de la centrale (depuis la technologie jusqu'au maintien) à l'aide d'un commentaire guidé ou d'explications schématiques, de même que le maintien d'un des six groupes de turbines en place, afin de conserver in situ un témoin de la production passée.

Le MPO est d'avis que le respect des mesures d'atténuation proposées concernant la préservation ou l'enregistrement des biens patrimoniaux existants, de même que la préservation du bâtiment et la concertation du milieu en vue de la détermination de la vocation de la centrale existante, sont des mesures satisfaisantes qui permettront d'atténuer l'impact causé par la perte de fonction de la centrale actuelle et de l'arasement de certains ouvrages connexes sur le patrimoine bâti. L'impact résiduel sur la valeur patrimoniale est donc jugé non important après atténuation.

La préservation du bâtiment de la centrale existante est positive dans la mesure où le site conservera les caractéristiques d'une installation hydroélectrique d'intérêt exceptionnel. De plus, les nouveaux ouvrages ne devraient pas altérer de façon importante l'intérêt patrimonial du site hydroélectrique de Grand-Mère en raison de la distance qui les séparera des ouvrages conservés et de la préoccupation du promoteur à ce sujet.

7.5. Effets des changements de l'environnement sur la santé humaine

Le projet n'est pas susceptible de causer d'impact sur la santé humaine. Le projet n'occasionnera pas de modification de la qualité de l'eau et il n'y aura pas remise en suspension de sédiments démontrant un dépassement de critère de sécurité pour le plomb et le mercure.

7.6. Effets des changements de l'environnement sur la situation socio-économique

7.6.1. Économie et emploi

Les travaux de construction du nouvel aménagement occasionneront des retombées régionales estimées à 115 millions de dollars, soit environ 34 % du coût total des travaux d'aménagement, de même que la création d'emploi évaluée à environ 1 000 années-personnes dans la région pendant la durée du projet. Il s'agit d'un impact positif important.

7.6.2. Récréotourisme

Le nouveau mode d'exploitation hivernal de la centrale occasionnera dans les biefs amont des centrales de Grand-Mère, de Shawinigan et de La Gabelle, la formation de fissures et de bourrelets de glace le long des berges qui pourrait diminuer l'accessibilité au centre de la rivière pour la pratique d'activités hivernales (motoneige, VTT, patinage, ski de randonnée, marche, course automobile, etc.), l'accessibilité aux résidences secondaires situées sur des îles, de même que rendre moins attrayants les sites de pêche situés près des rives.

Les variations du niveau d'eau et la présence d'une couverture de glace irrégulière empêcheront la pratique de telles activités dans les tronçons d'eau vive situés en aval des centrales de Grand-Mère et Shawinigan. Toutefois, ces secteurs sont présentement peu utilisés pour les activités récréatives hivernales.

De plus, il ne sera plus possible de rejoindre le sentier de motoneige (no 347) à partir du point d'accès situé en rive gauche, en amont du déversoir existant, étant donné que la couverture de glace sera dorénavant instable dans ce secteur.

Afin d'atténuer ces impacts, le promoteur indique qu'il compte convenir avec les autorités concernées d'un transfert de la piste de motoneige afin de permettre l'accès au plan d'eau en rive gauche à partir du réseau local de même que d'instaurer des mesures nécessaires pour maintenir l'accès à la rivière pour la pratique de la motoneige et du VTT durant la saison hivernale et ce, dès la première année d'exploitation.

Il indique de plus, qu'il ajustera le mode de production en pointe horaire de façon à favoriser la stabilité du couvert de glace, mais qu'il ne pourra assurer un accès sécuritaire à la rivière dans les zones d'eau vive, pas plus qu'il ne peut le faire aujourd'hui.

Le promoteur procédera à l'installation d'une estacade hivernale à l'amont des rapides des Hêtres de façon à améliorer la formation de la couverture de glace et sa stabilité et éviter ainsi la formation d'embâcle dans le secteur des rapides des Hêtres. Il y aura également mise en place d'un système de signalisation des zones à risques et information de la population sur le déroulement des travaux et les nouvelles conditions qui prévaudront sur la rivière.

L'instauration d'un système de surveillance de la couverture de glace lui permettra de déterminer si des correctifs doivent être apportés au mode d'exploitation ou aux ouvrages de manière à atteindre l'objectif de compatibilité de gestion des centrales avec l'usage récréotouristique de la rivière. Il est à noter que le promoteur s'est engagé à prendre les mesures nécessaires pour maintenir l'accessibilité à la couverture de glace au centre de la rivière.

Le MPO juge que l'impact du projet sur l'accessibilité sera non important, étant donné que des mesures d'atténuation pourront être développées avec le milieu et que ces mesures pourront être bonifiées à la lumière des enseignements des programmes de suivi qu'il réalisera sur les glaces et sur l'usage du Saint-Maurice à des fins récréotouristiques.

On doit de plus souligner que le bief amont de La Gabelle est déjà soumis à des marnages hivernaux d'environ un mètre d'amplitude qui sont responsables de la formation de bourrelets de glace et de fissures le long des rives et que des activités de pêches et de motoneige (piste Trans-Québec no 3) se pratiquent présentement dans ce secteur. La fluctuation du niveau d'eau en période hivernale ne constitue donc pas une nouvelle condition à laquelle la population n'a jamais été confrontée.

Il est possible que ces marnages occasionnent toutefois certains réajustements pour la pratique de ces activités, mais ces changements seront vraisemblablement peu importants compte tenu de l'existence de conditions similaires déjà existantes dans le secteur de l'aménagement de La Gabelle et des mesures d'atténuation et de suivi qui sont prévues à cet effet.

En ce qui a trait aux activités estivales, mentionnons que le transfert de la centrale en rive gauche occasionnera des changements hydrologiques qui pourront affecter les emplacements de pêche actuellement utilisés en aval immédiat de l'aménagement. Certains sites de pêche disparaîtront alors que de nouveaux seront créés. Il y aura transfert du chemin de portage et construction d'une rampe de mise à l'eau à proximité de la future centrale de manière à compenser la perte d'accès au plan d'eau due à la construction de cette nouvelle infrastructure. Cet aménagement pourra contribuer au développement récréotouristique local, car il n'existe en ce moment aucun accès aménagé en rive gauche dans ce secteur. 

7.6.3. Utilisation du sol

La seule source d'impact identifiée, touchant l'utilisation projetée du sol, est le changement de vocation de la centrale désaffectée.

Un comité mixte formé d'Hydro-Québec, de représentants du milieu, de la municipalité de Grand-Mère et de la société Abitibi-Consolidated, étudie présentement l'utilisation à d'autres fins de la centrale existante (utilisation éducative et culturelle, utilisation industrielle ou espaces à bureaux).

Selon une étude réalisée par le promoteur et traitant de la polyvalence du site (Tecsult, 1996), l'utilisation commerciale ou résidentielle de la centrale ne peut être envisagée compte tenu de différents facteurs, tels la qualité de vie, les coûts importants de reconversion du bâtiment, les problèmes d'accès et de stationnement et l'isolement du site.

Des différentes options étudiées, seule l'utilisation commerciale du site pourrait occasionner la modification du bâtiment et risquerait de modifier ses caractéristiques architecturales et sa valeur patrimoniale. Une telle utilisation est toutefois peu probable étant donné les contraintes précédemment citées.

L'utilisation éducative ou culturelle du site semble présenter quant à elle peu d'intérêt étant donné le contexte socio-économique actuel, les contraintes liées à l'accès au bâtiment et au coût de la réfection du lieu, et le fait que les équipements régionaux existants sont suffisants.

Selon cette même étude, l'utilisation industrielle du bâtiment comme site d'entreposage serait l'option la plus avantageuse.

Selon le promoteur, l'impact de la préservation du bâtiment désaffecté et son usage à d'autres fins que la production hydroélectrique pourra être considéré comme nul dans l'éventualité où la nouvelle vocation de la centrale n'occasionnerait aucune modification du plan de zonage, ni d'augmentation de la circulation sur la propriété de la papetière qui doit être traversée pour rejoindre le bâtiment existant.

Il est peu probable que les options mentionnées, quant aux usages futurs de la centrale existante, occasionneront des effets importants sur l'utilisation du territoire. On peut de plus penser que la présence de représentants de la papetière au sein du comité mixte formé pour décider du sort de la centrale pourra faire en sorte que cette entreprise sera en mesure de faire valoir son point de vue si des impacts négatifs importants sont attendus sur l'utilisation du site.

Il est à noter toutefois que l'évaluation des impacts des projets associés au futur changement de vocation du lieu ne fait pas partie de la portée de la présente étude, étant donné que le choix de vocation future de la centrale existante n'est pas lié à l'autorisation du nouvel aménagement. Le projet qui sera retenu constitue donc un projet distinct au sens de la LCÉE, car il n'y a pas d'interdépendance ni lien entre le projet du nouvel aménagement et celui de la future vocation de la centrale existante. Il y aurait interdépendance si le projet principal ne pouvait être mené à bien sans entreprendre un autre ouvrage ou une autre activité concrète, ce qui n'est pas le cas présentement. De plus, il n'y a pas de lien entre les deux projets car la décision d'entreprendre l'exécution du projet principal ne rend pas inévitable l'exécution d'autres ouvrages ou activités. En fait, le sort de la centrale existante pourra être déterminé bien au-delà de la décision d'autoriser ou non le projet.

L'impact de la vocation future de la centrale sur l'utilisation du sol est donc considéré comme indépendant du projet actuellement évalué. L'option d'utilisation qui sera retenue devra cependant altérer le moins possible la qualité architecturale de la centrale et elle devra être soumise aux procédures d'évaluation prévues selon la nature du projet qui sera présenté. 

7.6.4. Qualité de vie

La répercussion du projet sur la qualité de vie est jugée non importante. Un suivi est d'ailleurs prévu afin de vérifier les prévisions de l'étude d'impact et le respect des normes en vigueur en ce qui a trait à l'ambiance sonore.

7.7. Effets des changements de l'environnement sur l'utilisation traditionnelle courante des terres et des ressources par les autochtones

Le projet n'est pas susceptible de causer un impact sur ce plan étant donné qu'il n'y a aucune utilisation du territoire par les communautés autochtones dans le secteur et que le site des travaux ne fait pas partie du territoire revendiqué par le Conseil de la Nation des Atikamekw. 

7.8. Effet de l'environnement sur le projet

Des événements naturels tels que des tremblements de terre ou de fortes crues ont été pris en compte par le promoteur lors de la conception des différents aménagements (voir section 7.9). Les zones susceptibles d'être inondées suite à la rupture du barrage de Grand-Mère, concurrente aux ruptures des barrages situés en amont, sont indiqués au tableau 3 du complément du rapport d'avant-projet produit par le promoteur.

Le nouvel aménagement est de plus conçu pour que tout débit de crue exceptionnel puisse franchir les ouvrages d'évacuation avec un niveau d'eau à l'amont de la centrale qui reste égale ou inférieur à celui de l'aménagement existant et ce, même sous une crue déca-millénaire (9 480 m³/s) ou sous la crue maximale probable (12 350 m³/s). 

7.9. Impacts causés par des accidents ou des défaillances

La rupture ou le débordement d'un batardeau, provoqués par une crue plus importante que la crue de conception, la rupture totale ou partielle d'un barrage due à l'usure du temps ou à des effets externes, tels un tremblement de terre ou une activité sismique attribuable à des coups de charge ou de crue, et le déversement de produits pétroliers ou autres substances lors de travaux de construction, sont les principaux incidents ou défaillances associés au projet.

La principale mesure de précaution relative à la construction des batardeaux est le fait que les critères de conception tiennent compte de la durée d'utilisation de chacun d'eux. Plus leur durée d'utilisation est grande, plus la récurrence de crue qui conditionne leur conception sera grande également.

Le débordement ou la rupture des batardeaux auront pour conséquences d'emporter vers l'aval les matériaux utilisés pour leur construction (sables, bois et terre) de même que des équipements légers. Ces derniers seront dans la mesure du possible récupérés après la crue. Sur le plan de la sécurité, un comité nommé « urgence-barrage » décidera de l'évacuation du chantier de façon préventive ou urgente selon le cas. Des mesures d'interventions permettront, si le temps le permet, de limiter les impacts dans le milieu.

Compte tenu de la nature des impacts attendus et des très faibles risques de débordement, la rupture ou la défaillance des ouvrages de dérivation ne devraient pas avoir de conséquences environnementales importantes.

Le chapitre 1.3.4.1 du complément du rapport d'avant-projet indique l'évaluation des impacts d'une rupture de barrages sur la rivière Saint-Maurice. Élaborée à partir de trois scénarios, il s'agit du pire des cas possibles et c'est sur cette base que les plans d'urgence ont été élaborés.

Selon un tel scénario, il appert que la rupture du barrage Gouin et de ceux situés en aval touchera 45 000 personnes et occasionnera notamment la perte de biens culturels et historiques, la perturbation de services municipaux et publics (réseaux d'aqueducs, routiers, de télécommunications et d'énergie électrique), des pertes commerciales et industrielles, des pertes de revenus d'emploi et de biens personnels, de même que des effets sur le milieu physique (érosion des rives, augmentation de la vitesse d'écoulement de l'eau et rupture du couvert de glace). Les zones susceptibles d'être inondées sont indiquées au tableau 3 du complément du rapport d'avant-projet produit par le promoteur.

Sur le plan de la prévention, il est mentionné que le barrage de Grand-Mère continuera, même après sa reconstruction, de jouir du degré de surveillance le plus élevé. La fréquence des inspections sera mensuelle jusqu'à la stabilisation du comportement de l'ouvrage. De plus, la fréquence des relevés de l'instrumentation sera doublée par rapport à celles d'un aménagement dont le comportement est connu.

Le promoteur décrit son plan d'urgence relatif à un tel incident au chapitre 4.6 du volume 1 du rapport d'avant-projet. On y retrouve le schéma décisionnel en situation d'urgence, la mention des fonctions du centre de coordination des urgences et de documents relatifs à de telles interventions. Des pratiques d'intervention concernant le déversement de produits pétroliers et la gestion de déchets et de sols contaminés sont également mentionnées.

Le MPO considère comme satisfaisant l'identification des impacts à ce sujet de même que les mesures de prévention, d'intervention et les plans d'urgence qui y sont proposés. 

7.10. Effets du projet sur les ressources renouvelables

Le projet n'est pas susceptible d'occasionner d'effets importants sur les ressources renouvelables que constituent l'eau, la forêt, les pêcheries et le sol.

Il n'y aura pas de changement du bilan journalier de débit de la rivière et la qualité de l'eau ne sera pas altérée par la gestion de la nouvelle centrale. La forêt sera affectée d'une façon minimale car une très petite superficie (15 ha) de bois de faible valeur commerciale sera touchée. Les pêcheries ne seront pas touchées étant donné qu'une mesure de compensation remplacera les frayères perdues suite à la réalisation projet. Les sols touchés par les travaux sont qualifiés de pauvres et ne possèdent aucune valeur agricole.

En fait, le remplacement d'une centrale et des ouvrages jugés vétustes permettra d'augmenter la puissance installée de 70 MW à un site déjà existant, ce qui constitue un gain du point de vue du développement durable, car cela permet une exploitation plus efficace d'un aménagement existant avant de considérer l'aménagement de nouveaux sites.

7.11. Effets cumulatifs

Cette section se veut un résumé de la partie 2 du complément du rapport d'avant-projet traitant de l'évaluation des effets cumulatifs qui résulteront de la réalisation du nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère. La méthode utilisée et le traitement de ces effets sont en accord avec les exigences de la LCÉE à ce sujet.

Cinq enjeux principaux, ainsi que les composantes du milieu qui leur sont associées, ont été identifiés par le promoteur après consultation avec le MPO et l'ACÉE. Il sont discutés ci-dessous. Les limites de la zone d'étude des effets cumulatifs sont définies au nord par la municipalité de La Tuque et au sud par l'embouchure du Saint-Maurice. Les limites temporelles ont été fixées entre 1989 et 2004, soit dix ans avant jusqu'à dix ans après la construction du nouvel aménagement. 

7.11.1. Patrimoine physique et culturel

L'impact du projet de Grand-Mère sur le patrimoine physique et culturel s'ajoute aux projets de modernisation des équipements le long du Saint-Maurice et à l'évolution du secteur industriel lui-même (p. ex. l'abandon du flottage) qui ont un effet cumulatif sur le patrimoine industriel de la région. Selon le promoteur, ces projets ont un impact fort sur le patrimoine bâti et technologique de la région.

En contrepartie, de nombreux projets, tels le Centre d'interprétation de l'industrie forestière à Grandes-Piles (drave et flottage du bois), la Cité de l'énergie à Shawinigan (hydroélectricité), le Centre d'interprétation de Saint-Étienne-des-Grès (patrimoine historique de la centrale de La Gabelle), et la préservation des composantes ayant une valeur patrimoniale dans les aménagements hydroélectriques déjà réhabilités par Hydro-Québec (La Gabelle, Shawinigan et La Tuque), contribuent à la mise en valeur du patrimoine industriel de la Mauricie.

La politique d'Hydro-Québec et les mesures d'atténuation proposées par celle-ci concernant la protection et la mise en valeur du patrimoine bâti, ainsi que la volonté du promoteur de collaborer à la détermination de la nouvelle vocation du bâtiment et de convenir d'un mode de mise en valeur de l'appareillage désaffecté, contribueront également à préserver le patrimoine industriel de la région et de faire en sorte d'assurer que cet impact demeure le plus faible possible dans les circonstances.

Le MPO est également d'avis que cet impact est non important, au sens de la LCÉE, étant donné les mesures d'atténuations précédemment mentionnées (voir section 7.4). 

7.11.2. Récréotourisme

Les effets cumulatifs des différents projets du milieu contribuant à améliorer les infrastructures nautiques (agrandissement, ajout et consolidation de marina et de rampes de mises à l'eau) et la qualité du milieu en vue de faciliter la pratique des activités nautiques (assainissement des eaux, nettoyage des rives et cessation du flottage) favoriseront une augmentation de l'usage récréotouristique du corridor du Saint-Maurice. L'augmentation des activités estivales devrait également augmenter par effet d'entraînement les activités hivernales étant donné le développement de l'infrastructure d'accueil ainsi engendré.

Tel que mentionné précédemment (section 7.6.2), l'impact du projet de Grand-Mère sur les activités récréotouristiques pourrait se traduire par une difficulté d'accès à la rivière à la suite de la modification du régime des glaces due à la nouvelle gestion de pointe de la centrale. Au fil des ans, le projet de Grand-Mère pourrait ainsi entraîner des effets cumulatifs si les difficultés d'accès étaient telles qu'elles diminuaient le pouvoir d'attraction de la rivière auprès des villégiateurs.

Le promoteur conclut que les impacts cumulatifs du projet de Grand-Mère sur le récréotourisme seront négligeables dans le cas où les mesures d'atténuation seront efficaces et que la population réagira favorablement aux nouvelles conditions d'accès. De fait, il indique que la réalisation d'un programme de suivi et l'adoption de mesures d'atténuation, élaborées en concertation avec le milieu, assureront un impact résiduel faible.

Compte tenu des engagements du promoteur concernant le maintien de l'accessibilité au couvert de glace au centre de la rivière, qu'il existe présentement dans la région (secteur La Gabelle) des bourrelets et des fissures le long des rives qui n'empêchent pas la pratique d'activités hivernales, et que des mesures d'atténuation et un suivi seront réalisés à ce sujet, le MPO considère que l'impact cumulatif du projet sur le récréotourisme est non important. 

7.11.3. État des berges

Tel que mentionné précédemment (section 7.2), l'impact du projet de Grand-Mère sur l'érosion des berges est considéré comme faible. Une augmentation possible de l'érosion pourra toutefois se manifester dans certains secteurs déjà fortement érodés tel qu'au pied de talus très instables.

En considérant d'autres sources d'érosion que sont l'arrêt du flottage du bois et l'augmentation concurrente de l'activité nautique, le promoteur a déterminé que les effets cumulatifs pourraient se faire surtout sentir dans le bief situé à l'amont de l'aménagement de Grand-Mère et, dans une moindre mesure, dans les biefs situés à l'amont et à l'aval du complexe de Shawinigan et dans le bief situé à l'amont de l'aménagement de La Gabelle.

Le MPO considère que la mise en œuvre de mesures d'atténuation et d'un programme de suivi rigoureux fera toutefois en sorte que les impacts cumulatifs résiduels sur l'érosion des berges seront négligeables. 

7.11.4. Habitat du poisson

Différents types de projets (remblayage, modification hydrodynamique, dragage, etc.) sont susceptibles de causer une perte d'habitat du poisson et demandent de ce fait une compensation, afin de respecter le principe d'aucune perte nette de l'habitat, tel qu'énoncé dans la Politique de gestion de l'habitat du poisson du MPO.

Dans son analyse des effets cumulatifs sur l'habitat du poisson, le promoteur n'a mentionné que les projets pour lesquels de telles compensations ont été demandées. Il s'agit en l'occurrence des projets d'aménagements hydroélectriques de La Gabelle et du présent projet de Grand-Mère pour lesquels des frayères seront recréées.

Dans le cas du projet de Grand-Mère, des herbiers aquatiques et des marais, susceptibles de posséder des frayères en eau calme et des aires d'alevinages , pourraient subir les effets négatifs des marnages hivernaux et de l'action des glaces, occasionnés par la nouvelle production de pointe de la centrale. La fréquentation accrue du plan d'eau par les motos marines dans des zones peu profondes utilisées pour le frai pourrait également perturber cette activité.

Étant donné que la perte d'habitat attribuable au projet est compensée par la création de nouvelles aires de frai et qu'un programme de suivi de la végétation riveraine et aquatique permettra de vérifier la justesse des prévisions (c.-à-d. impact sur l'habitat du poisson considéré comme faible), le MPO est d'avis que le projet ne devrait pas causer d'effets cumulatifs importants sur l'habitat du poisson.

7.11.5. Gestion des déblais

En considérant que la quantité de déblais de roches excavée (500 000 m³) pourrait subvenir aux besoins locaux pour une période de dix ans, si les conditions du marché demeurent inchangées, Hydro-Québec a évalué la possibilité de récupérer ces déblais et de les utiliser dans une perspective de développement durable. Toutefois, cette alternative risque de causer des préjudices sérieux aux carrières existantes de même que des impacts importants sur l'ambiance sonore dans les quartiers résidentiels avoisinants, et sur l'état des routes suite au concassage et au transport de ces matériaux. De plus, ces impacts sont jugés plus importants que ceux présentement engendrés par l'exploitation des deux carrières existantes. C'est pourquoi le promoteur a choisi d'enfouir les déblais excédentaires dans la sablière d'Excavation Gaston Trépanier.

Le MPO est d'avis que les effets cumulatifs de la gestion des déblais de roche occasionnés par le projet de Grand-Mère sont négligeables. 

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8. Programme de suivi

Le chapitre 6 du volume 1 du rapport d'avant-projet décrit le programme de surveillance et de suivi proposé par le promoteur. Des précisions concernant le suivi de la végétation riveraine et aquatique sont également retrouvées dans le document complémentaire du rapport d'avant projet.

Essentiellement, le programme de suivi comporte sept volets touchant tant le milieu naturel (compensation pour l'habitat du poisson et végétation aquatique et riveraine), et le milieu humain (économie régionale et usage du Saint-Maurice à des fins récréotouristiques) que le milieu physique (régime des glaces, érosion des berges et ambiance sonore). C'est le promoteur qui sera responsable de la mise en application de ces différents suivis.

Nous jugeons que ces derniers permettront d'atteindre les grands objectifs visés par ces programmes. Toutefois, certaines modalités de ces suivis pourront être modifiées de façon à permettre une meilleure évaluation des effets environnementaux attendus. C'est le cas par exemple pour le suivi de la végétation riveraine et aquatique, où l'ajout d'une station d'échantillonnage devra être considéré dans le tronçon de la rivière compris entre l'aménagement de Grand-Mère et les rapides des Hêtres, où l'amplitude des marnages est la plus élevée.

Les résultats des suivis devront être acheminés au MPO qui pourra, le cas échéant, demander des modifications à la lumière des résultats obtenus.

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9. Conditions d'approbation

Les conditions d'approbations du rapport d'étude approfondie sont :

  • que le promoteur mette en œuvre les mesures d'atténuation, de même que les programmes de suivi qui sont mentionnés dans les différents documents produits par ce dernier, ainsi que dans le présent document;
  • que le promoteur doit effectuer, avant le début des travaux, les relevés de l'avifaune demandés par Environnement Canada. Il devra transmettre les résultats de ces inventaires à ce ministère de même. Si, à la lumière de ces travaux, on constate la présence d'espèces rares, vulnérables, menacées de disparition ou susceptibles d'être désignées comme telle, le promoteur devra alors réaliser des mesures d'atténuation appropriées et approuvées par Environnement Canada;
  • que le promoteur signe une entente de compensation avec le MPO dans laquelle sont précisés les aménagements et les conditions de suivi requis pour compenser la perte d'habitat du poisson attribuable à la réalisation du projet; et
  • que le promoteur s'engage à évaluer, lors du suivi de la végétation aquatique et riveraine, les pertes d'habitats du poisson susceptibles de se produire dans de tels milieux et qui sont attribuables à l'action érosive des glaces due au projet. Les pertes d'habitat du poisson éventuellement notées devront le cas échéant être compensées.

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10. Conclusion

Suite à l'analyse de la nature du projet, de la description des travaux, des infrastructures et des modifications du régime de gestion hydraulique proposées en période hivernale, le ministère des Pêches et des Océans, à titre d'autorité responsable, tel que défini dans la LCÉE, a évalué les impacts potentiels que le projet du nouvel aménagement hydroélectrique de Grand-Mère serait susceptible d'engendrer sur l'environnement.

Cet examen a été complété en se basant sur l'information transmise par le promoteur et les avis des différents ministères fédéraux concernés par la réalisation du projet.

Compte tenu des mesures d'atténuation, de compensation et des programmes de suivi proposés, ainsi que des engagements du promoteur, le MPO a déterminé que le projet proposé, tel que défini par la portée de l'étude, n'est pas susceptible d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants.

Il s'agit d'une conclusion préliminaire qui sera reconsidérée suite à l'examen des commentaires reçus lors de la période de consultation du public.

Préparé par :
Jean-Guy Jacques, Biologiste-analyste
Gestion de l'habitat du poisson

4 juin 1999

Révisé par :
Gordon Walsh, Gestionnaire p.i.
Gestion de l'habitat du poisson

4 juin 1999

Approuvé par :
Michelle Chartrand
Directeur général régional
Pêches et Océans Canada
Région Laurentienne

7 juin 1999

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11. Bibliographie

Gauthier, J. et Y. Aubry (sous la direction de), 1995, Les Oiseaux nicheurs du Québec : Atlas des oiseaux nicheurs du Québec méridional. Publié en collaboration avec la Société québécoise de protection des oiseaux et le Service canadien de la faune, Environnement Canada, région du Québec, Montréal, xviii + 1295 p.

GDG Conseil inc., 1997, Inventaire de l'utilisation par la faune des habitats de la rivière Saint-Maurice entre les Rapides-des-Hêtres et la centrale La Gabelle, rapport présenté à la Corporation de gestion du développement du bassin de la rivière Saint-Maurice, 17 p. + 9 annexes.

Ministère des Pêches et des Océans. 1986, Politique de gestion de l'habitat du poisson. Ministère des Pêches et des Océans, Ottawa. 29 p.

Lessard, M., 1997, Sites hydroélectriques d'Hydro-Québec - Franchissabilité par les poissons migrateurs, Rapport de Martin Lessard enr. au service Milieu naturel, Direction principale Communication et Environnement, Hydro-Québec, 188 p. + annexes.

Tecsult inc., 1996, Nouvelle centrale de Grand-Mère : Polyvalence de la centrale actuelle. Étude réalisée pour Hydro-Québec, Vice-présidence Ingénierie et Services. Pagination multiple.

Therrien, J. 1996, Guide d'évaluation de la problématique de la dévalaison des poissons en relation avec les petites centrales hydroélectriques. Rapport du Groupe-conseil Génivar présenté au ministère des Pêches et des Océans et à l'Association des producteurs privés d'hydroélectricité du Québec. 111 p.

Travade, F. et M. Larinier, 1992, La migration de dévalaison : Problèmes et dispositifs. Bull. Fr. Pêche Pisci., 326-327 : 165-176.

Wright, D.G. et G.E. Hopky, 1998, Lignes directrices concernant l'utilisation d'explosifs à l'intérieur ou à proximité des eaux de pêche canadiennes. Rapp. tech. can. sci. halieut. aquat. 2107 : iv + 34 p.

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