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Rapport de la commission d'évaluation environnementale - Projet Voisey's Bay

17 Gestion de l'environnement

La gestion de l'environnement, telle qu'abordée dans le présent rapport, inclut les politiques, les procédures et les actions de la VBNC, ainsi que le contexte global, notamment les dispositions réglementaires et la participation des autres parties intéressées. Voici quelques-uns des principaux thèmes qui ont été abordés lors des audiences publiques :

  • le rapport entre la gestion de l'environnement et les différents niveaux de certitude en ce qui concerne les effets prévus du projet;
  • la distinction entre les questions qui doivent être résolues à l'étape de l'évaluation environnementale et celles qui pourraient et devraient être abordées à une étape ultérieure de la délivrance des permis;
  • le lien entre la gestion de l'environnement et les changements qui pourraient être apportés au projet en cours de route;
  • les conséquences de la situation actuelle en matière de revendications territoriales sur la gestion de l'environnement;
  • la nécessité d'une participation réelle des Autochtones aux activités de surveillance, ainsi qu'aux processus de réglementation continue, et les différentes ententes et structures organisationnelles par lesquelles ceci pourrait être accompli;
  • le mode de surveillance, les composantes des programmes de suivi et la pertinence des études de base existantes pour soutenir les programmes en question;
  • les questions relatives à la réhabilitation, y compris une garantie financière suffisante pour tout dommage éventuel.

La VBNC a fourni des renseignements sur son système de gestion de la salubrité et de la sécurité de l'environnement, qu'elle décrit comme un cadre dont elle se sert pour organiser ses efforts de protection de l'environnement, prévenir la pollution et améliorer continuellement son rendement environnemental. La société minière a également décrit le mode de surveillance qu'elle propose.

Le système de gestion de la salubrité et de la sécurité de l'environnement comporterait quatre niveaux de documentation : un manuel portant sur l'ensemble du système, 11 plans de protection environnementale qui seraient mis à jour au besoin pendant toute la durée du projet, des procédures détaillées pour l'exécution de diverses activités, ainsi que les formules et documents utilisés pour soutenir le système. La VBNC est une filiale en propriété exclusive d'Inco Limited, et son système de gestion de la salubrité et de la sécurité de l'environnement est conforme aux procédures et aux politiques d'Inco, de même qu'aux directives de l'entreprise en matière de salubrité et de sécurité de l'environnement. De plus, Inco procède à des vérifications de la salubrité et de la sécurité de l'environnement dans toutes ses divisions, y compris dans ses filiales, et les résultats des vérifications sont présentés au conseil d'administration d'Inco.

Le programme de surveillance que propose la VBNC comporterait deux grandes composantes. Une surveillance de la conformité serait effectuée pour s'assurer que le projet répond aux exigences réglementaires particulières, de même qu'aux normes et objectifs internes. Et une surveillance des effets environnementaux, ou « programme de suivi », qui permettrait de contrôler et de valider les extrapolations de l'évaluation environnementale, de vérifier la justesse des différents modèles utilisés durant le processus, ainsi que de déterminer si les mesures d'atténuation ont été efficaces et si l'environnement a été protégé.

La VBNC propose d'élaborer le programme de surveillance des effets environnementaux en collaboration avec l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu, par le biais d'accords bilatéraux officiels appelés « partenariats de surveillance ». La VBNC n'a donc pas donné de détails sur les études de surveillance des effets environnementaux qui ont été proposées dans l'étude d'impact environnemental, mais elle a néanmoins exposé les grandes lignes des critères qu'elle utiliserait pour déterminer, parmi les interactions entre le projet et les composantes valorisées de l'écosystème, celles qui feraient l'objet d'une surveillance.

La VBNC a souligné qu'il était important de fonder les études de surveillance sur des objectifs clairs et atteignables, des hypothèses vérifiables, des méthodes pratiques, des indicateurs déterminants pouvant servir de système d'alerte rapide en cas de changement environnemental, des paramètres qui peuvent être mesurés avec précision, de même que des voies de pénétration qui établissent un lien entre les sources de contamination et les récepteurs. Autrement, on risque de procéder à des études qui se révéleraient, selon la VBNC, « riches en données, mais pauvres en information ».

Les partenariats de surveillance, tels que conçus par la VBNC et approuvés par l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu lors des audiences, seraient des « relations d'affaires » visant à assurer la participation des Autochtones à toutes les étapes du programme de surveillance, à intégrer le savoir autochtone et à fournir des rapports efficaces et en temps utile aux communautés locales.

La VBNC propose de financer les activités de surveillance requises pour assurer la conformité à la réglementation, lesquelles incluraient toute forme de suivi exigé aux termes de l'article 38 de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. La société minière a toutefois fait part de sa volonté de participer, à titre de partenaire financier, à d'autres programmes visant des objectifs régionaux plus larges et dans le cadre desquels il serait possible d'établir des intérêts mutuels.

17.1 Contexte réglementaire

Le contexte réglementaire relativement à la gestion de l'environnement du projet de la baie Voisey, comporte trois aspects fondamentaux. Le premier a trait aux différentes parties de lois applicables, aux approbations et permis qui y sont liés (L'étude d'impact environnemental en a identifié 50) et aux procédures observées pour accorder de telles approbations, qui peuvent comprendre, ou non, des occasions officielles ou officieuses de procéder à des examens publics et de tenir des consultations publiques.

Le deuxième aspect, sur lequel Environnement Canada a particulièrement insisté, comprend les différentes ententes, stratégies et directives produites par le gouvernement, généralement avec le concours d'autres parties intéressées, et destinées à promouvoir un développement durable par le biais d'une intendance de l'environnement responsable. Bien qu'elles ne lient pas les parties légalement, elles devraient jouer un rôle fondamental en aidant la VBNC à éviter les effets et à prévenir la pollution.

Le troisième aspect est le pouvoir de l'autorité responsable, aux termes de l'article 38 de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, d'exiger qu'un promoteur mette en oeuvre un programme de suivi officiel pour vérifier la justesse des prévisions formulées dans le cadre de l'évaluation environnementale d'un projet et de juger de l'efficacité des mesures d'atténuation des effets environnementaux. Le ministère des Pêches et des Océans du Canada a déjà indiqué qu'il exigerait un tel programme et la VBNC a exposé dans ses grandes lignes et en termes généraux ce que le programme devrait inclure, à son avis.

La commission note qu'une fois que les ententes sur les revendications territoriales auront été conclues, le contexte réglementaire changera dans une certaine mesure, tel que discuté au chapitre 4. Bien que les gouvernements fédéral et provincial conserveraient leur autorité en matière de réglementation, ils seraient tenus de recueillir les recommandations des parties autochtones et d'en tenir compte. Le reste du présent chapitre traite donc de la situation actuelle, en l'absence d'ententes sur les revendications territoriales.

Des participants ont exprimé des inquiétudes au sujet de la réglementation du projet, notamment les préoccupations suivantes :

  • Comment les différentes approbations sont-elles accordées, et dans quel ordre? Une ou plusieurs parties du projet pourraient-elles démarrer petit à petit, avant que certaines ententes déterminantes ne soient conclues?
  • Le cadre réglementaire présente certaines lacunes, lesquelles devront être comblées au moyen du processus d'évaluation environnementale, sous forme de conditions.
  • Les processus d'approbation et de délivrance des permis ne permettent pas nécessairement la tenue d'un examen et d'une consultation par le public ou par les parties intéressées. D'importantes décisions relatives au projet pourraient être prises sans la participation des Inuit et des Innu.
  • Les arrangements non officiels qui ont été pris pour recueillir les commentaires de l'Association des Inuit du Labrador et de la nation Innu dans le cadre des processus antérieurs de délivrance de permis pour des activités d'exploration, bien qu'ils constituent un pas dans la bonne direction, n'ont pas toujours donné des résultats satisfaisants. Les organisations autochtones ont manqué de temps et de ressources pour examiner les demandes, et dans bien des cas, elles n'ont pas obtenu de réactions à leurs commentaires.
  • Puisque les différents permis sont délivrés une pièce à la fois par un grand nombre d'organismes, il est possible que personne ne tienne compte des effets combinés de toutes les activités permises.
  • Bien que plusieurs ministères soient disposés à consulter les parties autochtones intéressées relativement aux différents permis et aux différentes approbations, un tel processus pourrait être un fardeau considérable pour l'Association des Inuit du Labrador et pour la nation Innu.
  • Les organismes gouvernementaux ont certainement de bonnes intentions, mais ils manquent de ressources pour procéder, dans le Nord du Labrador, au type d'inspections sur le terrain qui sont exigées pour assurer le suivi de la conformité.

L'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu ont recommandé que certaines de ces préoccupations soient abordées par le biais de la négociation d'une entente environnementale qui porterait sur des questions telles que la participation des Autochtones aux processus de réglementation et sur les modalités qui ne sont pas comprises dans les règlements.

Bien qu'un grand nombre de ministères fédéraux et provinciaux joueraient un rôle dans la réglementation continue du projet, le ministère des Pêches et des Océans du Canada, en tant qu'autorité responsable, assumerait des responsabilités permanentes aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale une fois l'étape de l'évaluation environnementale terminée. Les responsabilités en question viendraient s'ajouter aux fonctions du ministère des Pêches et des Océans du Canada en ce qui concerne les poissons, les habitats des poissons, ainsi que la sécurité et la navigation maritimes. Elles comprendraient la supervision du programme de suivi et la coordination de la réponse du gouvernement fédéral au rapport de la commission d'évaluation.

En ce qui concerne Terre-Neuve et le Labrador, le ministère provincial de l'Environnement et du Travail de même que le ministère provincial de l'Énergie et des Mines joueraient des rôles déterminants, bien que la province n'ait pas officiellement indiqué si elle se chargerait de la coordination, ni de quelle façon elle pourrait le faire. Le ministère de l'Énergie et des Mines administrerait le bail d'exploitation minière conformément à la loi provinciale sur les minéraux. Bien que le bail n'exige aucune surveillance constante, ni la production de rapports fréquents, il est probable qu'il constitue un document très important pour ce qui est de garantir l'imputabilité des dommages causés à l'environnement.

17.2 Gestion de l'environnement et incertitude

L'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu ont exprimé de vives inquiétudes relativement au fait d'avoir à s'en remettre aux dispositions du régime d'évaluation environnementale pour régler ce qu'elles considèrent comme les incertitudes fondamentales du projet. L'Association des Inuit du Labrador a souligné que la VBNC ne doit pas croire qu'une approbation dans le cadre du processus d'évaluation environnementale donne « carte blanche » à la société minière pour démarrer un projet qui comporte des éléments mal définis. L'Association des Inuit du Labrador a dit craindre plus particulièrement que les aspects du projet relatifs au rythme et l'ampleur de l'exploitation, aux plans de transport maritime et à la mine souterraine « échappent à l'évaluation environnementale », et a affirmé ne pas être convaincue que le système actuel de réglementation et de délivrance des permis puisse mettre fin à de telles échappatoires.

Pour la nation Innu, les incertitudes se rapportent à ce qu'elle considère comme une identification inadéquate des impacts; une incapacité à évaluer pleinement les autres méthodes pour réaliser les principales composantes du projet; et plusieurs « questions non résolues », telles que le plan de réhabilitation, le programme de surveillance et la décision relative au remblayage de la mine à ciel ouvert. La nation Innu a soutenu que la surveillance ne doit pas être considérée comme un remède « aux graves incertitudes qui concernent les effets environnementaux du projet, ni l'évaluation inadéquate d'autres moyens raisonnables de mener à bien le projet ».

L'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu ont toutes deux proposé que la commission interrompe le processus d'évaluation environnementale jusqu'à ce que la VBNC ait résolu les incertitudes en question en fournissant des renseignements supplémentaires. Cependant, l'une et l'autre ont fait d'autres recommandations pour le cas où l'on autoriserait le démarrage du projet.

Du point de vue de la VBNC, il serait préférable de procéder à l'évaluation environnementale au début du processus de planification, lorsque l'évaluation a le plus de chance d'influer sur les décisions à l'étape de la conception. Puisque le projet évoluera inévitablement, du moins dans une certaine mesure, il serait irréaliste de s'attendre à une description complète du projet à l'étape de l'évaluation.

La commission est d'accord avec l'Association des Inuit du Labrador et avec la nation Innu pour dire qu'il reste un certain nombre d'incertitudes l'égard du projet. La commission croit cependant que dans la plupart des cas, de telles incertitudes ne sont pas excessives à cette étape-ci de la planification et de la conception du projet, d'autant plus que certaines d'entre elles se rapportent à des renseignements à venir, qui ne pourraient être obtenus que si la VBNC pouvait entreprendre une exploration souterraine plus poussée.

L'incertitude relative au taux de production et à la durée de vie de la mine est abordée au chapitre 3, Nécessité de réaliser le projet et intendance des ressources, et plus particulièrement dans la recommandation 2. Les questions relatives à l'évaluation des autres moyens de mettre le projet en marche sont abordées dans les sections du présent rapport qui abordent ces questions. Parmi les autres questions relevées au cours de l'évaluation environnementale et qui devront être examinées plus tard au cours du projet, il convient de mentionner :

  • la gestion des résidus pendant l'étape de l'exploitation souterraine (que cela nécessite le développement du North Tailings Basin ou encore le remplacement ou le report de sa mise en service grâce à l'utilisation d'autres solutions de remplacement, comme le remblayage de la mine à ciel ouvert);
  • la réévaluation de la décision de construire un second diffuseur dans la baie Kangeklualuk;
  • toute nouvelle installation de surface liée à l'étape de l'exploitation souterraine, particulièrement à l'Ouest du ruisseau Reid;
  • toute modification apportée au lac Headwater ou au North Tailings Basin, telle que la modification de la hauteur d'un barrage dans le but d'augmenter le volume;
  • la construction d'une installation distincte pour l'évacuation des boues, si nécessaire;
  • la décision à savoir si le trop-plein du lac Headwater pourrait être réacheminé vers le système du ruisseau Reid après l'étape de désaffectation;
  • toute modification importante aux dispositions relatives au transport maritime;
  • l'examen et l'approbation du programme de surveillance et du plan de réhabilitation.

La commission convient, avec l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu, qu'il faut trouver un moyen de s'assurer que le processus décisionnel continue en matière de réglementation et de surveillance des effets environnementaux tienne compte de la participation des Autochtones, ainsi que de l'ensemble des conséquences environnementales.

17.3 Mesures en matière de cogestion de l'environnement

L'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu ont toutes deux stipulé que le projet ne devrait pas démarrer avant que les ententes sur les revendications territoriales ne soient conclues, et ce pour plusieurs raisons. En ce qui concerne la gestion de l'environnement, les deux parties négocient actuellement certaines composantes de la cogestion de l'environnement et des ressources qui pourraient être appliquées au projet de la baie Voisey, ainsi qu'à d'autres aménagements industriels éventuels. Les deux parties ont également indiqué que des dispositions de cogestion fondées sur des revendications territoriales seraient une meilleure façon de procéder que ne le sont les structures spéciales créées projet par projet, car cela leur permettrait d'approfondir davantage les effets cumulatifs de différents projets et constituerait une utilisation plus efficace de leur temps et de leurs ressources. Toutefois, l'Association des Inuit du Labrador, de même que la nation Innu ont fait des recommandations détaillées en matière de structures environnementales, lesquelles serviraient probablement de mesures provisoires si le projet démarrait avant que des ententes sur les revendications territoriales ne soient conclues.

Les conclusions et les recommandations de la commission qui figurent dans le présent chapitre doivent être lues en parallèle avec le chapitre 4, Ententes sur les revendications territoriales et ententes sur les impacts et les avantages, et plus particulièrement avec la recommandation 3. Bien que la commission considère qu'il serait préférable que les gouvernements ratifient une entente de principe avec l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu avant que le projet ne soit mis en marche, la commission reconnaît que des mesures de remplacement équivalentes permettraient aussi au Canada et à la province d'assumer leurs responsabilités fiduciaires. Le présent chapitre traite des mesures de remplacement en question.

L'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu ont toutes deux proposé que les parties au protocole d'entente et la VBNC élaborent et signent une entente environnementale pluripartite. L'entente lierait toutes les parties et servirait de cadre pour la surveillance environnementale. Du point de vue de l'Association des Inuit du Labrador, l'entente permettrait d'officialiser les engagements des entreprises, de fournir un mécanisme pour incorporer le savoir autochtone et d'aborder les questions qui n'auraient pas été étudiées à fond durant l'évaluation environnementale. La nation Innu a également recommandé que l'entente couvre les exigences en matière de réhabilitation, de sécurité financière et de production de rapports, ainsi que l'approbation des différents plans que préparera la VBNC dans le cadre de son système de gestion de la salubrité et de la sécurité de l'environnement.

L'entente environnementale proposée était vraisemblablement fondée sur l'entente similaire qui a été signée au terme de l'évaluation environnementale réalisée pour le projet de mine de diamants de la BHP dans les Territoires du Nord-Ouest. Bien que les parties autochtones aient participé à l'élaboration et à la mise en uvre de l'entente en question, elles n'en étaient pas réellement les signataires. Le but déclaré de l'entente des Territoires du Nord-Ouest était de prévoir des dispositions relatives aux « questions environnementales liées au projet, autres que les questions régies par les lois, les règlements et les instruments de réglementation » et l'entente couvrait une grande partie des sujets proposés par l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu.

Les propositions de l'Association des Inuit du Labrador et de la nation Innu divergent en ce qui a trait à la question de la mise en uvre de l'entente environnementale. L'Association des Inuit du Labrador a recommandé la mise sur pied d'un organisme indépendant chargé des ententes environnementales et formé de représentants des cinq parties. La nation Innu, pour sa part, a prévu un organisme trilatéral de surveillance environnementale composé de représentants de la VBNC et des deux organisations autochtones. La nation Innu a indiqué que l'organisme en question pourrait être le même que le partenariat de surveillance décrit précédemment.

L'Association des Inuit du Labrador a également proposé deux autres ententes bilatérales : une entente sur le transport maritime, que signeraient la VBNC et l'Association des Inuit du Labrador et qui décrirait de quelle façon fonctionnerait le volet du projet concernant le transport, plus particulièrement les expéditions hivernales; et un plan intégré de gestion des opérations maritimes, que le ministère des Pêches et Océans du Canada et l'Association des Inuit du Labrador élaboreraient conformément aux modalités de la Loi sur les océans. La VBNC a accepté de négocier l'entente sur le transport maritime. Toutefois, le ministère des Pêches et des Océans du Canada a indiqué qu'il devra tenir de nombreuses consultations sur la nouvelle Loi sur les océans avant d'amorcer un processus de planification intégrée de la gestion des opérations maritimes, lequel de toute façon ne pourrait pas être un processus bilatéral. Le ministère des Pêches et des Océans du Canada a laissé entendre qu'il pourrait y avoir d'autres avenues possibles, mais n'a rien précisé à ce sujet au cours des audiences.

La VBNC a critiqué l'entente environnementale proposée et a qualifié d'inutile la mise sur pied d'un organisme indépendant. Elle a également déclaré que de telles propositions estompaient les axes de responsabilité qui, selon la VBNC, seraient beaucoup plus clairement définis dans des partenariats de surveillance bilatéraux établis par le truchement des ententes sur les impacts et les avantages. La VBNC a également souligné qu'elle devrait conserver la responsabilité ultime en matière de surveillance de la conformité, ainsi qu'en matière de décisions gestionnelles liées au projet en ce qui concerne les mesures d'atténuation.

Les gouvernements fédéral et provincial ont indiqué que leurs rôles et leurs processus de réglementation étaient, à leur avis, clairement établis et convenaient au travail à entreprendre, ajoutant que d'autres modalités pourraient être jointes aux diverses approbations du projet, ce qui aurait pour effet de lier toutes les parties. Bien que les gouvernements se soient dits prêts à discuter des façons possibles d'améliorer la participation des Autochtones aux processus de réglementation, ils se sont montrés très discrets quant à la nécessité d'une entente ou d'un organisme indépendant de surveillance.

17.3.1 Gestion de l'environnement : fonctions et liens

La commission croit qu'il est important de préciser les diverses fonctions auxquelles on peut s'attendre d'une nouvelle structure de gestion de l'environnement. A la lumière des renseignements qui ont été présentés durant l'examen, la commission croit que de telles fonctions devraient inclure les aspects suivants :

  • Jusqu'à ce que les ententes sur les revendications territoriales soient conclues, la structure de gestion de l'environnement doit faire en sorte que les gouvernements consultent pleinement les parties autochtones et qu'ils leur permettent de participer aux décisions importantes qui concernent leurs territoires ancestraux.
  • La structure doit promouvoir la coordination parmi les différents organismes gouvernementaux, de même qu'entre les gouvernements fédéral et provincial, pour assurer que les processus de réglementation ne deviennent pas compartimentés au point d'éliminer toute possibilité de perspective d'ensemble.
  • Elle doit faire en sorte que le savoir autochtone, de même que les préoccupations et les priorités locales soient incorporées dans le système de gestion de la salubrité et de la sécurité de l'environnement de la VBNC, ainsi que dans la conception et la mise en uvre du programme de surveillance.
  • Elle doit proposer une façon satisfaisante d'aborder les futurs changements et les futurs développements du projet.
  • Elle doit proposer une façon plausible et efficace de surveiller le programme de suivi, comme l'exige la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
  • Elle doit fournir aux Inuit et aux Innu des occasions de participer directement à la surveillance du projet.
  • Elle ne doit pas surcharger la VBNC de niveaux de bureaucratie additionnels et inutiles.
  • Elle doit refléter le fait qu'une saine gestion de l'environnement et un progrès constant vers la durabilité sont des questions de responsabilité et d'intérêt public.

La commission reconnaît qu'une gestion de l'environnement efficace exigerait trois formes de liens. Le premier unirait la VBNC et les organismes de réglementation. La commission croit qu'un tel lien est bien établi et qu'en général, le secteur minier est bien réglementé - ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de place pour l'amélioration. Toutefois, devant la commission, les parties n'ont pas démontré que le système de réglementation lié au projet présentait des lacunes importantes, sauf en ce qui a trait la réglementation des activités qui touchent les glaces de mer au sud du 60° (et ceci ne concerne pas la législation minière).

Le deuxième lien met en cause la VBNC et les parties autochtones. Bien qu'il soit clair que le lien en question n'est pas tout à fait harmonieux, les trois parties ont néanmoins convenu de négocier des partenariats de surveillance. Par le biais des partenariats en question, les Inuit et les Innu pourraient participer directement aux consultations relatives la conception et à la mise en uvre des études de surveillance, y compris la définition de seuils de déclenchement d'une intervention; participeraient réellement à la surveillance; recevraient régulièrement des rapports sur les résultats de la surveillance; et auraient à leur disposition les ressources nécessaires pour soutenir leur participation. Rien n'indique que de telles dispositions étaient incluses dans les ententes sur les impacts et les avantages qui ont été signées dans les Territoires du Nord-Ouest (quoi qu'il soit impossible de s'en assurer étant donné que les ententes sur les impacts et les avantages sont confidentielles). Dans ce cas, l'entente environnementale était donc conçue de façon à inclure au moins certains de ces éléments.

La commission en conclut que c'est tout à fait dans l'intérêt d'une saine gestion de l'environnement que l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu collaborent étroitement avec la VBNC par le biais de partenariats de surveillance pour maximiser la participation des Autochtones à la conception ainsi qu'à la mise en uvre des plans de système de gestion de la salubrité et de la sécurité de l'environnement, y compris du programme de surveillance. Il n'est pas nécessaire de dédoubler une telle fonction par le biais du volet consultatif d'un organisme de surveillance indépendant. Cependant, cela ne remplace pas l'examen officiel effectué dans des conditions normales ni le rôle de surveillance inclus dans le programme de suivi.

Recommandation 93

La commission recommande que la VBNC négocie avec l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu, dans le cadre de leur entente respectives sur les impacts et les avantages, les partenariats de surveillance que la société minière a proposés. Les partenariats de surveillance doivent assurer la participation des Inuit et des Innu à la conception, à la mise en uvre et à l'évaluation du programme de surveillance. Ils doivent également fournir aux Inuit et aux Innu des occasions d'obtenir la formation nécessaire ainsi que de recueillir et d'analyser des données en ayant recours à des méthodes scientifiques de même qu'à l'observation et aux connaissances autochtones.

Le troisième lien met en cause les parties autochtones et les gouvernements. Selon l'opinion de la commission, ce lien est celui qui est le moins bien défini et le moins bien établi, bien que le protocole d'entente représente en lui-même un pas prometteur dans cette direction. L'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu ont déclaré craindre énormément d'être exclues effectivement des processus réglementaires ultérieurs. Par exemple, le ministère des Pêches et des Océans du Canada exige que la VBNC consulte le public avant de présenter des propositions d'indemnisation des habitants pour la perte d'habitat de poisson, mais il ne dispose pas lui-même de processus formel pour poursuivre cette consultation pendant qu'il prépare le plan d'indemnisation, qui est un accord contractuel confidentiel entre le ministère des Pêches et des Océans du Canada et la VBNC. La commission reconnaît que ce troisième lien serait considérablement changé et vraisemblablement amélioré par de nouvelles ententes d'autonomie administrative et de cogestion, lorsqu'on sera parvenu à des ententes sur les revendications territoriales.

L'entente environnementale proposée par l'Association des Inuit du Labrador et par la nation Innu garantirait la participation des Autochtones à l'examen de la surveillance environnementale et permettrait de regrouper un certain nombre de conditions auxquelles la VBNC doit se conformer. La commission convient que ces deux fonctions sont nécessaires, mais elle croit qu'une entente quadripartite, qui poursuivrait la relation établie par le truchement du protocole d'entente, constituerait la meilleure façon de remplir la première fonction.

En ce qui concerne la deuxième fonction, la commission s'inquiète aussi de la possibilité que l'on dépende de façon excessive d'ententes contractuelles pour s'acquitter des fonctions de gestion environnementale qui sont habituellement régies par des règlements. La commission croit que les modalités établies dans le cadre de la présente évaluation, en plus et au-delà des exigences réglementaires existantes, pourraient et devraient être intégrées aux divers permis et approbations pour leur donner un poids juridique convenable et la transparence voulue, ce qui entraînerait l'obligation de rendre compte au public. Il conviendrait que les engagements pris par la VBNC propos des occasions d'affaires et des avantages procurés par les emplois figurent dans des ententes sur les impacts et les avantages, qui lieraient aussi les parties.

L'entente environnementale pourrait être propre au projet, et par conséquent s'appliquer seulement au projet de la baie Voisey. Toutefois, la commission croit qu'il serait plus efficace et plus efficient d'élargir le champ d'application de l'entente pour inclure d'autres activités relatives aux ressources minérales dans le Nord du Labrador, notamment la poursuite de l'exploration.

Recommandation 94

La commission recommande que, avant que les travaux de construction ne démarrent, le Canada, la province de Terre-Neuve et du Labrador, l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu négocient une entente de cogestion environnementale pour traiter des aspects biophysiques et socio-économiques de l'exploitation des ressources minérales dans le Nord du Labrador. L'entente devrait établir un mécanisme pour assurer la participation constante des quatre parties dans les processus réglementaires connexes, dans l'examen des futurs aménagements liés au projet et dans l'administration du programme de suivi.

Cette entente devrait aussi répondre aux exigences relatives à la consultation et à la participation dont faisait état la décision Delgamuukw pour justifier l'atteinte aux droits et au titre des Autochtones.

La commission remarque que les quatre parties à cette entente peuvent souhaiter en accroître la portée pour qu'elle englobe les questions relatives d'autres aspects de l'exploitation des ressources dans le Nord du Labrador.

17.3.2 Structures organisationnelles pour la gestion environnementale

Lors des débats tenus en audiences sur les structures organisationnelles destinées à encadrer la surveillance environnementale, des intervenants ont décrit deux organismes indépendants de surveillance établis pour d'autres projets: l'Institut de surveillance et de recherche environnementales, créé à la suite de l'évaluation du programme de vols à basse altitude au Labrador, et l'Agence indépendante de surveillance environnementale, formée pour la mine de diamants Ekati dans les Territoires du Nord-Ouest. L'Institut de surveillance et de recherche environnementales semble viser surtout à promouvoir et à financer la recherche pour appuyer la surveillance des effets. La nation Innu a exprimé des réserves à propos de l'efficacité de cet organisme, optant plutôt, dans les recommandations présentées à la commission relativement à la gestion environnementale, pour une relation plus directe avec la VBNC, qui se traduirait par une surveillance menée en partenariat. L'Institut de surveillance et de recherche environnementales semble mieux correspondre au modèle proposé par l'Association des Inuit du Labrador.

Les deux organismes semblent constituer un moyen grâce auquel on peut tirer parti de compétences hautement scientifiques indépendantes lors de l'examen de programmes de surveillance. Toutefois, dans le cas du projet de la baie Voisey, la commission n'appuie pas cette façon de procéder pour les raisons suivantes. La commission est impressionnée par le haut calibre des scientifiques du gouvernement qui ont participé au processus d'examen et par leur connaissance et expérience du terrain, et elle croit qu'ils devraient continuer à faire bénéficier de leurs connaissances le programme de suivi. La commission estime aussi que les organisations autochtones doivent avoir accès à des connaissances et à des conseils scientifiques, mais que cet accès doit être direct et non relever d'un comité scientifique d'examen travaillant pour une agence indépendante. Un accès direct permettrait de garantir que les conseils scientifiques répondent vraiment aux besoins des organisations autochtones qui pourraient, s'il y a lieu, les intégrer facilement à leur savoir et à leur expertise. Ces organisations pourraient alors faire part de ces conseils directement à la VBNC, par le biais de leur partenariat de surveillance, ou aux autres signataires de l'entente quadripartite mentionnée dans la recommandation 94.

Comme exemple d'intégration efficace de savoir autochtone et des connaissances scientifiques, la commission souligne l'apport appréciable des groupes d'experts Inuit de l'Association des Inuit du Labrador lors des audiences. La commission verrait l'utilisation directe de conseillers scientifiques par les organisations autochtones comme une excellente occasion de poursuivre ce genre d'intégration.

La commission reconnaît la nécessité d'une participation complète des Autochtones à l'examen de la mise en uvre et des résultats du programme de surveillance. En outre, la commission croit qu'une agence indépendante de surveillance ne constituerait pas un mécanisme approprié parce que le partenariat proposé assurerait une participation directe des Autochtones la conception et à la mise en uvre du programme de surveillance. La commission ne croit pas que la VBNC devrait être tenue de financer en même temps les partenariats de surveillance et une agence distincte.

La commission en conclut que les gouvernements fédéral et provincial, l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu, devraient renoncer la création d'une agence indépendante et créer plutôt conjointement le Conseil consultatif de l'environnement, qui serait expressément chargé d'évaluer de façon permanente la performance de la VBNC en matière d'environnement et de traiter des préoccupations et des problèmes au fur et à mesure qu'ils se présentent. Le rôle du Conseil consultatif comprendrait la formulation de recommandations et l'examen des aspects suivants :

  • les demandes de permis initiales et ultérieures;
  • la version définitive du système de gestion de la salubrité et de la sécurité de l'environnement de la VBNC, ainsi que des plans de protection environnementale de la société minière;
  • les résultats de la surveillance de la conformité à la réglementation;
  • les activités entreprises dans le cadre du programme de suivi, y compris de la surveillance des effets environnementaux;
  • d'autres questions relatives au projet que l'une ou l'autre des quatre parties ou la VBNC souhaiterait soumettre au Conseil consultatif de l'environnement.

Le ministère ou organisme fédéral ou provincial responsable prendrait encore les décisions finales sur les questions liées à la réglementation, sauf s'il a expressément délégué ce pouvoir au Conseil consultatif de l'environnement. On établirait toutefois des protocoles d'entente pour donner au Conseil suffisamment de temps pour faire ses recommandations, ainsi que pour assurer que ces recommandations soient soigneusement étudiées et que le Conseil reçoive de l'information en retour. En même temps, la commission croit que le Conseil et les parties concernées devraient rendre les processus d'examen aussi efficaces que possible, pour éviter de retarder ou gêner inutilement la VBNC.

A l'instar de l'entente sur l'exploitation des ressources minérales, le conseil consultatif pourrait viser spécifiquement le projet de la baie Voisey, ou pourrait, de façon plus efficace, remplir un mandat élargi touchant toutes les questions relatives à l'exploration et à l'exploitation des ressources minérales dans le Nord du Labrador.

Recommandation 95

La commission recommande que, en vertu de l'entente de cogestion environnementale, les quatre parties au protocole d'entente devraient établir un Conseil consultatif de l'environnement pour le Nord du Labrador, dont le mandat consisterait à examiner les résultats de la surveillance de la conformité la réglementation et les résultats du programme de suivi établi en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale; de vérifier les demandes de permis et les futures propositions d'aménagement aux fins du projet; de traiter les questions et les problèmes de gestion environnementale récurrents. Le Canada et la province assureraient le financement des opérations de ce conseil, qui devrait comporter un secrétariat pour coordonner les fonctions administratives et scientifiques. Le Conseil devrait publier un rapport annuel.

Pour aider le Conseil consultatif de l'environnement dans son travail, la commission juge que la VBNC devrait regrouper les divers exigences et engagements environnementaux et socio-économiques en un seul document qui servirait de référence pour évaluer la performance du projet.

Recommandation 96

La commission recommande que, avant que la construction ne commence, la VBNC prépare un document portant sur sa performance environnementale et qui indique clairement les principales modalités selon lesquelles le projet serait réalisé et tous les engagements pris par la VBNC, y compris toutes les normes de performance, les garanties financières, les objectifs, les quotas et les modalités de présentation des rapports. Le document devrait indiquer pour chaque cas la raison juridique correspondante (par exemple : joint pour répondre à une condition posée pour une approbation en vertu de la Loi sur la protection des eaux navigables, inclus dans une entente sur les impacts et les avantages ou dans une entente librement conclue). Ce document serait conçu pour aider la VBNC à rendre compte de sa performance environnementale et pour aider les gouvernements, les organisations autochtones et le public à l'évaluer.

17.3.3 Entente sur le transport et plan de gestion des opérations maritimes

L'Association des Inuit du Labrador et la VBNC ont déjà convenu de négocier une entente bilatérale sur le transport, destinée à fixer les modalités selon lesquelles il sera effectué, particulièrement dans la banquise côtière de la zone du projet. Ces modalités comprendraient notamment des mesures de surveillance. Bien que le transport hivernal ne commencerait pas avant un certain nombre d'années, l'Association des Inuit du Labrador souhaite, avant que la construction ne commence, négocier certaines dispositions relatives au transport pendant la saison des eaux libres. Ces dispositions pourraient porter sur la vitesse, le bruit, les effets sur les oiseaux et le calendrier de navigation.

L'Association des Inuit du Labrador espère aussi élaborer, sous l'égide de la Loi sur les océans un plan intégré de gestion des opérations maritimes qui pourrait en fin de compte englober une partie ou toutes les dispositions prévues dans l'entente sur le transport. Au départ, le ministère des Pêches et des Océans du Canada avait déclaré à la commission, lors des audiences, que l'établissement d'un tel plan serait une activité entièrement appropriée et réalisable aux termes de la Loi sur les océans. Par la suite le ministère des Pêches et des Océans du Canada a toutefois indiqué qu'il n'est pas encore en mesure de passer au processus de planification à l'aide d'un tel mécanisme et n'a pas indiqué quand il serait prêt à le faire.

Des faits présentés pendant l'examen ont convaincu la commission que la législation et les systèmes de gestion des ressources existants ne protègent pas convenablement les intérêts des Inuit du Labrador et de tout autre utilisateur de la banquise. Le ministère des Pêches et des Océans du Canada n'avait guère d'espoir que la législation pourrait être modifiée rapidement et a ajouté que si la Loi sur les océans est prometteuse, on ne peut s'en servir immédiatement. Tel qu'indiqué au chapitre 10, la commission estime que trop d'incertitudes entourent encore les effets du transport hivernal, et qu'elles doivent être résolues de façon satisfaisante avant que le transport hivernal puisse être autorisé. La commission croit aussi comprendre que la conclusion d'une entente sur des revendications territoriales pourrait assigner à l'Association des Inuit du Labrador un rôle important dans la gestion des opérations maritimes.

Compte tenu de toutes ces circonstances, la commission reconnaît la pertinence de négocier une entente sur le transport. La commission reconnaît les intérêts de l'Association des Inuit du Labrador dans la gestion des zones de banquise côtière, et elle est par conséquent d'accord avec la position de l'Association selon laquelle cette entente devrait être négociée bilatéralement. La commission croit toutefois que l'entente pourrait être renforcée si le ministère des Pêches et des Océans du Canada participait au processus. Ce ministère a soulevé une question précise : la possibilité qu'une entente bilatérale puisse nuire à la sécurité des navires en restreignant la liberté du capitaine de prendre des décisions. Bien que cela semble improbable, car ni la VBNC, ni l'Association des Inuit du Labrador ne souhaitent compromettre la sécurité de la navigation, une telle réserve indique que la Garde côtière canadienne pourrait avoir un rôle utile à jouer dans ce processus, en raison de ses connaissances, de son expérience et de ses responsabilités réglementaires.

La commission croit qu'une entente bilatérale est, dans ce cas, un compromis raisonnable, compte tenu des intérêts des deux parties et du délai probable avant que le gouvernement fédéral ne soit en mesure de modifier la loi. L'entente comprendrait toutefois des questions qui intéresse un vaste public; aussi la commission encourage-t-elle les deux parties à rendre public le contenu de cette entente, pour maintenir la transparence du processus de gestion environnementale. Ce contenu comprendrait les résultats des études sur l'entreposage des concentrés.

Recommandation 97

La commission recommande que la VBNC négocie une entente sur le transport avec l'Association des Inuit du Labrador avant que la construction du projet ne commence. Au départ, cette entente devrait traiter des protocoles pour le transport pendant la période des eaux libres, ainsi que des modalités à suivre pour les questions qui n'ont pas encore été réglées propos du transport hivernal. La commission recommande aussi que le ministère des Pêches et des Océans du Canada joue dans ce processus un rôle de conseiller en ce qui concerne les questions de sécurité maritime et de protection environnementale.

La commission convient avec l'Association des Inuit du Labrador que la région de la côte septentrionale du Labrador a besoin d'une planification et d'une gestion maritime coordonnées, surtout pour gérer les effets cumulatifs d'autres projets ou l'accroissement du transport à travers les glaces. La commission convient aussi que l'environnement marin du Labrador mérite une protection équivalente à celle qui est fournie à des écosystèmes plus septentrionaux, mais semblables. Comme l'ont expliqué certains intervenants au cours des audiences, les Inuit du Labrador sont aussi dépendants de la glace de mer que ne le sont les Inuit vivant au Nord du 60° de lattitude.

La commission prévoit que l'Association des Inuit du Labrador serait lorsque ses revendications territoriales seront réglées, dans une position plus forte pour poursuivre ce but, mais qu'elle aurait encore besoin de la collaboration du ministère des Pêches et des Océans du Canada. Tout en étant consciente que l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur les océans représente pour le ministère des Pêches et des Océans du Canada de fortes demandes en matière de temps et de ressources, la commission croit néanmoins que le gouvernement fédéral devrait fournir les ressources nécessaires pour entreprendre, à tout le moins, l'élaboration d'un plan de gestion des opérations maritimes dans le Nord du Labrador. Il pourrait être impossible pour le moment de procéder à une planification complète, mais la commission incite le ministère des Pêches et des Océans du Canada et l'Association des Inuit du Labrador à déterminer des étapes préliminaires et éventuellement des solutions de remplacement pour une gestion maritime élargie, comme le ministère des Pêches et des Océans du Canada l'avait suggéré lors de la dernière séance technique tenue dans le cadre des audiences.

Recommandation 98

La commission recommande que le ministère des Pêches et des Océans du Canada et l'Association des Inuit du Labrador entreprennent des pourparlers en vue de déterminer les domaines d'intérêt, les priorités, les ressources et les occasions relativement à la planification de la gestion maritime, pour déterminer quels pourraient être les premiers éléments d'un processus de planification intégrée de gestion des opérations maritimes. Ces pourparlers devraient être conçus pour aboutir dans un délai raisonnable à un protocole d'entente. Ce processus de planification devrait préférablement s'appuyer sur les dispositions de l'article 31 de la Loi sur les océans; sinon, le ministère des Pêches et des Océans du Canada devrait indiquer une autre façon de procéder.

La figure 17.1 indique les rapports des diverses ententes et unités organisationnelles entre elles et avec le projet.

17.4 Système de gestion environnementale de la VBNC

La commission reconnaît que le secteur minier canadien a réalisé d'énormes progrès en matière de gestion environnementale au cours des dernières années. Il leur est de moins en moins facile d'échapper à leur responsabilité en cas de piètre performance environnementale et c'est devenu, par le fait même, un facteur important du maintien de la viabilité générale de l'entreprise. La commission reconnaît aussi le rôle qu'ont joué les gouvernements, les groupes de travailleurs et les groupes de défense de l'intérêt public dans l'amélioration de ces performances. La commission a été impressionnée par le cadre du système de gestion environnementale soumis par la VBNC. Elle croit que la société minière, appuyée par sa société mère, possède les connaissances et l'expérience requises pour mener à bien son projet.

Les gouvernements fédéral et provincial ont indiqué qu'ils aimeraient aider à l'élaboration et au peaufinage de certains aspects des plans de protection de l'environnement. Environnement Canada, par exemple, souhaite travailler avec la VBNC à l'élaboration de plans de prévention de la pollution et de gestion des déchets, et le ministère provincial de l'Environnement et du Travail souhaite pour sa part élaborer des protocoles d'auto-vérification environnementale, de concert avec la VBNC. Pour leur part, la nation Innu et le ministère des Pêches et des Océans du Canada veulent que les organismes de réglementation et les autres parties intéressées approuvent tous les programmes de protection de l'environnement et leurs mises à jour ultérieures.

La VBNC a fourni des renseignements sur son programme de santé et de sécurité au travail, qui veillerait à recueillir les commentaires des employés par l'entremise d'un comité qui se réunirait tous les mois. Un expert s'exprimant au nom de la nation Innu a proposé une liste abondante de recommandations concernant les programmes de santé et de sécurité au travail. Il a également évoqué le fait que l'exploitation minière du nickel était extrêmement dangereuse pour la santé des travailleurs. La commission mentionne que la documentation citée à l'appui de ce témoignage concerne surtout l'effet qu'avaient sur la santé les anciennes méthodes de traitement du nickel, alors que le projet de la baie Voisey prévoit un tout autre genre d'opérations. A la lumière de ces constatations, elle n'est pas convaincue que les travailleurs de la mine et de l'usine de concentration de la baie Voisey seraient soumis à des risques inacceptables pour la santé.

La commission constate qu'à l'instar de la gestion environnementale effectué en général par le secteur minier, celui-ci a apporté beaucoup d'améliorations au niveau de la santé et de la sécurité, sauf dans le cas de quelques exceptions notoires. On doit ces améliorations aux travailleurs du secteur dont les syndicats ont exercé des pressions. On a dit craindre que si les employés du projet choisissaient de ne pas se syndiquer à l'étape de l'exploitation, les employés nouvellement arrivés dans le secteur minier, un groupe qui engloberait probablement la plupart des employés autochtones, n'auraient ni l'expérience, ni l'appui organisationnel nécessaire pour assurer la protection de leurs intérêts. La commission prend bonne note de cette préoccupation, mais souligne qu'il y aurait certainement des employés expérimentés sur le chantier et que les intérêts des employés autochtones seraient également défendus par l'Association des Inuit du Labrador et par la nation Innu dans le cadre des ententes sur les impacts et les avantages, ainsi que par l'entremise des partenariats de surveillance.

La commission note que plusieurs des recommandations faites par l'expert de la nation Innu tombent dans le champ de compétence des organismes de réglementation provinciaux. Elle croit qu'une enquête approfondie des questions qui touchent la santé et la sécurité au travail dépasse le cadre de l'évaluation environnementale. Elle estime toutefois que le Conseil consultatif de l'environnement constituerait la meilleure tribune pour débattre les questions en suspens.

Recommandation 99

La commission recommande que la VBNC élabore, avant le début des travaux de construction, des programmes de protection de l'environnement, des plans d'intervention en cas d'urgence, ainsi que des programmes de santé et sécurité au travail, de concert avec les organismes de réglementation, et que ces plans ou ces programmes soient soumis à l'examen du Conseil consultatif de l'environnement qui formulera ses recommandations. Les programmes de protection de l'environnement et d'intervention en cas d'urgence devront être élaborés sous une forme utilisable sur le terrain et devront faire l'objet de révisions et de mises à jour périodiques.

17.5 Réhabilitation

Les principaux objectifs de la fermeture de l'exploitation minière et des programmes de réhabilitation, tels que définis par la VBNC, viseraient la protection de la sécurité et de la santé publiques, la réduction des coûts liés à l'entretien et à la surveillance postérieures à la fermeture, ainsi que la réduction des facteurs susceptibles d'endommager l'environnement. La VBNC élaborerait un plan détaillé relativement à la fermeture de la mine et ce, plusieurs années avant sa fermeture formelle. Peu de temps avant les audiences, la VBNC a soumis à la commission un plan de travail concernant la réhabilitation du terrain, un document distinct de l'étude d'impact environnemental. La réhabilitation se ferait progressivement; autrement dit, les zones altérées et les installations du projet seront réhabilitées au fur et à mesure qu'elles ne seront plus nécessaires.

Les aires de stockage des morts-terrains et des roches de mine non minéralisées seraient disposées en pentes convenables et stables et on restaurerait le couvert végétal sur les parties sujettes à l'érosion. On retirerait les bâtiments et les structures et tout emplacement altéré serait aménagé et profilé. La VBNC demanderait aux résidents locaux s'ils veulent ou non conserver en tout ou en partie le réseau de transport (les routes, le port et la piste d'atterrissage) pour les urgences. Dans la négative, la VBNC retirerait les structures, les ponceaux et les ponts, puis elle décompacterait la surface des routes et de la piste d'atterrissage. Ces surfaces seraient ensuite ensemencées ou laissées telles quelles en vue d'une restauration naturelle de la végétation. Les pipelines de surface seraient enlevés et ceux qui sont situés sous terre seraient retirés ou encore nettoyés et bouchés.

La réhabilitation de la mine à ciel ouvert, notamment en ce qui concerne les solutions de remplacement, sont abordées au chapitre 6, Gestion des résidus, des déchets rocheux et des eaux usées de la mine.

La désaffectation et les activités finales de réhabilitation pourraient prendre jusqu'à deux ans. Un programme d'inspection et de surveillance veillerait à vérifier la qualité de l'eau, à s'assurer de la stabilité des parois de la mine à ciel ouvert et des amoncellements rocheux, ainsi qu'à suivre les progrès des opérations de revégétation. L'étude d'impact environnemental a aussi déterminé quelques-unes des mesures à prendre en cas de fermeture temporaire pour des raisons opérationnelles ou économiques.

Les exigences en matière de réhabilitation feraient intégralement partie du bail minier et la VBNC aurait l'obligation de satisfaire à toutes ces exigences avant l'échéance du bail. Le bail courant exige de la société minière qu'elle s'assure que les pentes de tous les secteurs exploités de la mine ne dépassent pas 30 degrés et qu'elle remplace le sol sous les piles de stockage et rétablisse le couvert végétal. Dans les secteurs environnants, la société minière devra « remettre le paysage dans l'état où il était immédiatement avant le début des activités ou encore, dans un état qui, de l'avis du ministre, ne sera pas préjudiciable au paysage .

Les préoccupations suivantes ont été manifestées lors de l'examen :

  • la nécessité d'établir des normes et des lignes directrices en matière de performance environnementale, de manière à assurer une réhabilitation fructueuse;
  • des questions relatives à l'utilisation de produits végétaux indigènes;
  • la nécessité de tenir compte des commentaires du public en ce qui a trait à l'élaboration, à l'application et à la surveillance du programme de réhabilitation;
  • la nécessité d'offrir des garanties financières, pour assurer la disponibilité des fonds nécessaires pour mener à terme la réhabilitation.

La commission croit qu'aux yeux de nombreuses personnes, la réhabilitation constitue l'un des enjeux fondamentaux du projet, essentiellement pour deux raisons. Premièrement, les habitants du Labrador connaissent très bien les conséquences des activités minières lorsqu'elles ne sont pas assorties d'une obligation en matière de réhabilitation. Schefferville en est un bon exemple. Deuxièmement, pour les Innu et les Inuit, le respect du territoire et les soins qu'il faut lui prodiguer constitue une composante fondamentale de leur vision du monde. La commission reconnaît que pour plusieurs Autochtones, en particulier les aînés, le projet minier représente une atteinte à l'intégrité du territoire, malgré toute la vigilance dont on ferait preuve lors de la construction et de l'exploitation. Tout cela crée un sentiment de perte, particulièrement dans le cas de la baie Voisey qui occupe une place particulière dans le c ur des Innu et des Inuit. La commission estime qu'un programme de réhabilitation n'éliminerait pas nécessairement ce sentiment de perte, mais il permettrait de démontrer qu'on se soucie du territoire et qu'on préconise une bonne intendance son égard. Ce programme offrirait aussi aux Innu et aux Inuit la possibilité de participer au processus de « guérison » du territoire.

La commission en conclut que la VBNC devrait par conséquent s'assurer que le peuple autochtone joue un rôle de premier plan dans tous les aspects de la stratégie de réhabilitation, permettant ainsi de tirer parti de leurs connaissances écologiques traditionnelles, tout en leur offrant la possibilité de mettre en valeur leurs compétences et d'acquérir de nouvelles connaissances. Les partenariats de surveillance proposés pourraient alors être renommés, à juste titre, partenariats de surveillance et de réhabilitation.

Recommandation 100

La commission recommande que la VBNC, l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu négocient, dans le cadre des partenariats de surveillance, une entente qui comporterait d'importants niveaux de participation des Autochtones en matière de recherche, de planification, d'application et de surveillance du plan de réhabilitation au cours de la phase postérieure la désaffectation. Cette entente devrait comprendre un bon mécanisme de transfert du savoir autochtone, de même que de leurs compétences et connaissances techniques en matière de réhabilitation. Par le biais de cette entente, la VBNC et les partenaires Innu et Inuit seraient en mesure de collaborer à l'élaboration d'objectifs raisonnables et réalisables pour le processus de réhabilitation.

De l'avis de la commission, le cadre défini pour le plan de réhabilitation donne une bonne idée de la démarche qu'adopterait la VBNC. Il indique un certain nombre de défis que la société minière aurait à relever à cause du climat subarctique. En outre, il fait état de la nécessité de réaliser un programme de recherche continu pour trouver les façons les plus efficaces et pratiques de rétablir le couvert végétal aux endroits altérés.

Dans le cadre qu'elle a défini pour son plan de réhabilitation, la VBNC reconnaît le besoin de réduire au strict minimum le nombre d'endroits accidentés et de s'assurer que les activités ne causeront pas de dommages inutiles. La commission félicite la VBNC pour le mode d'action qu'elle envisage, mais elle reconnaît aussi qu'il n'est pas toujours facile de s'assurer que tous les travailleurs agiront en fonction des effets à long terme, surtout quand ils sont dans le feu de l'action. C'est pourquoi il sera important de trouver des façons de concrétiser la vision de la société minière, pour qu'à partir du premier jour de travail, les employés de la VBNC, les entrepreneurs et les sous-traitants travaillent déjà dans la perspective de la réhabilitation du paysage.

Recommandation 101

La commission recommande que la VBNC élabore, dès que possible et avant le début de la construction, des politiques et des systèmes de production de rapport et de reddition de comptes, pour s'assurer que les objectifs établis en matière de réhabilitation soient intégrés à tous les aspects de la conception, de la construction et de l'exploitation du projet, particulièrement en vue de réduire au minimum l'étendue des perturbations. A cette fin, la VBNC devrait :

  • poursuivre l'élaboration du plan de réhabilitation, en collaboration avec l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu;
  • réviser tous les plans de construction et d'exploitation en fonction de la réhabilitation des lieux;
  • donner une formation pertinente aux employés et organiser des séances de sensibilisation;
  • assurer la surveillance de la conformité au plan de réhabilitation;
  • produire des rapports sur l'avancement des travaux, destinés autant l'interne qu'à l'externe.

17.6 Garanties financières

Au cours de l'examen, certains participants ont exprimé des préoccupations en ce qui concerne la nécessité d'offrir des garanties financières visant s'assurer des aspects suivants :

  • qu'on sera en mesure de remédier ou de verser des indemnités en cas de dommages causés par des déversements ou des dommages accidentels;
  • que l'emplacement sera fermé de manière appropriée et réhabilité la fin du projet ou en cas de fermeture temporaire, et que tous les facteurs susceptibles d'endommager l'environnement seront neutralisés;
  • que des ressources suffisantes seraient disponibles pour veiller ce que les résidus et les stériles minéralisés soient submergés en permanence et pour assurer une surveillance à long terme.

Ces préoccupations concernent également les activités des entrepreneurs et des sous-traitants.

La VBNC a proposé de souscrire, dans la mesure du possible, à une assurance responsabilité contre toute atteinte à l'environnement, pour couvrir les coûts qui seraient liés aux interventions d'épuration en cas d'accident. Les autres dommages qui ne sont pas admissibles à une assurance responsabilité seraient couverts par une auto-assurance soutenue par l'actif d'Inco, société mère de la VBNC.

Le ministère provincial des Mines et de l'Énergie s'emploie à élaborer une nouvelle loi sur les mines, en vertu de laquelle le ministre possédera l'autorité formelle de demander des garanties financières lors de l'approbation d'un bail minier. Toutefois, dans le contexte législatif actuel, le ministère a déjà demandé aux sociétés minières de la province de s'engager financièrement assumer les coûts liés à la réhabilitation qu'il faudra réaliser. On constate donc que le principe et la mise en application sont déjà bien établis. A l'étape actuelle, la province n'est pas en mesure de préciser ce qu'elle estimerait être des garanties acceptables. Elle est toutefois extrêmement consciente des risques qu'elle pourrait encourir si aucun arrangement satisfaisant n'était pris, car la responsabilité incomberait alors aux habitants de Terre-Neuve et du Labrador.

La nation Innu a critiqué la notion d'auto-assurance. S'il advenait que la société minière éprouve des difficultés financières, il serait alors trop tard pour négocier le recours à d'autres garanties financières ou d'autres outils de garantie financière. La nation Innu était également préoccupée par le fait que les sociétés mères n'honorent pas toujours les engagements de leurs filiales. Ils ont recommandé qu'au moins une source de garantie soit exigée de la VBNC, notamment le cautionnement des coûts de réhabilitation, un dépôt de garantie, une garantie d'Inco fondée sur des éléments d'actif matériels, une marge de crédit ou des fonds en fiducie réservés à la surveillance. La nation Innu a également demandé que des dispositions soient prises en vue de permettre à l'Association des Inuit du Labrador et à la nation Innu d'avoir accès à ces fonds, le cas échéant.

Dans le cas de la mine de diamants Ekati dans les Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement a non seulement exigé que la société minière verse périodiquement des fonds dans un dépôt de garantie (dont le montant a été établi en fonction des progrès réalisés dans les travaux prévus au programme de réhabilitation continue), mais il a aussi demandé une « garantie irrévocable » de 20 millions de dollars. Dans son plan de réhabilitation, la VBNC estime le coût total de la désaffectation et de la réhabilitation à environ 60 millions de dollars.

La commission reconnaît que les garanties financières constituent une composante essentielle du processus de gestion environnementale, contrairement l'auto-assurance intégrale qui ne peut être envisagée comme une solution convenable. La commission reconnaît toutefois que les autres outils financiers, tels les cautionnements, posent également problème. Par exemple, si une compagnie voit sa cote de solvabilité abaissée en deçà d'un certain niveau, le cautionnement qu'elle aura obtenu cessera d'être garanti. Il existe cependant tout un éventail d'outils financiers. La province devrait spécifier, dans le bail minier, quels sont les outils qui procurent des garanties suffisantes, tout en n'accablant pas la VBNC d'un fardeau financier inutile.

La commission estime que, à la lumière de l'expérience acquise dans le cadre d'autres projets, notamment le projet de la mine de diamants Ekati, le ministère provincial des Mines et de l'Énergie devrait effectuer des recherches relativement aux autres options. Avant de joindre de telles exigences au bail minier, le ministère devrait aussi solliciter, auprès des autres parties intéressées, différents avis concernant ces options, par l'entremise du Conseil consultatif de l'environnement qui sera créé.

Recommandation 102

La commission recommande que le ministère des Mines et de l'Énergie de Terre-Neuve et du Labrador s'informe auprès du Conseil consultatif de l'environnement avant de décider des exigences pertinentes en matière de garanties financières qu'il conviendrait de joindre au bail minier. De telles garanties devraient entrer en vigueur graduellement pour couvrir les coûts estimés de réhabilitation et de surveillance postérieure à la désaffectation, en tout temps au cours du projet, et devraient comprendre des sommes en espèces appropriées. Ces garanties peuvent aussi prendre la forme de cautionnements, de liens sur des éléments d'actifs ou de garanties irrévocables.

17.7 Programmes de surveillance et de suivi

Parfois, au cours de l'examen, les termes « surveillance » et « suivi ont créé une certaine confusion. La surveillance peut comprendre la surveillance de la conformité et la surveillance des effets environnementaux. La surveillance de la conformité est une fonction réglementée qui incombe la VBNC. La surveillance des effets n'est pas réglementée pour le moment, mais Environnement Canada prévoit que le Règlement sur les effluents liquides des mines de métaux comprendra éventuellement des exigences en matière de surveillance des effets. Tout dépendant de l'enjeu, la surveillance des effets pourrait être effectuée par la VBNC ou par d'autres parties concernées.

Cependant, en vertu des dispositions de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, l'autorité responsable, dans ce cas-ci, le ministère des Pêches et des Océans du Canada, est en droit d'exiger que le promoteur mette en uvre un programme de suivi pour vérifier l'exactitude de l'évaluation environnementale ou pour déterminer l'efficacité des mesures d'atténuation. Un tel programme pourrait comprendre la surveillance des effets.

Dans les renseignements supplémentaires fournis à la commission, la VBNC a présenté un cadre de surveillance provisoire, indiquant qu'elle a l'intention de réviser ce cadre en collaboration avec les organismes gouvernementaux concernés, ainsi qu'avec l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu par le truchement des partenariats de surveillance. Le cadre de surveillance s'intéresse uniquement à la surveillance biophysique; la VBNC maintient que la surveillance des effets socio-économiques incombe à d'autres parties.

17.7.1 Surveillance des effets biophysiques

La VBNC a fourni une liste préliminaire des composantes valorisées de l'écosystème qui seront surveillées. Au cours des audiences, les critères utilisés pour dresser cette liste ont suscité plusieurs débats. La VBNC a fait valoir que la surveillance devrait porter surtout sur les composantes valorisées de l'écosystème qui, d'après l'étude d'impact environnemental, seront probablement touchées par le projet; autrement dit, les composantes pour lesquelles on a déjà établi qu'elles subiraient les effets des contaminants produits par le projet, à cause de l'existence d'une voie de pénétration. En outre, de nombreuses personnes ont indiqué qu'il y aurait toutefois de bonnes raisons de surveiller certaines composantes valorisées de l'écosystème pour lesquelles aucun effet n'a été prévu, pour vérifier l'exactitude des prévisions de l'étude d'impact environnemental. Lors des audiences, la VBNC a reconnu la validité et cet argument et a indiqué son désir de considérer la surveillance de certains secteurs supplémentaires.

On a aussi débattu du niveau trophique qu'il conviendrait de soumettre une surveillance. Les prédateurs au sommet ou près du sommet de la chaîne alimentaire, tels les rapaces ou les mammifères de plus grande taille sont souvent ceux dont le public s'inquiète le plus, mais ils ne sont pas nécessairement les plus susceptibles de fournir le plus de renseignements utiles aux fins d'un programme de surveillance. Les transformations susceptibles de se produire dans la chaîne alimentaire peuvent se manifester beaucoup plus tard au niveau trophique supérieur. En outre, il peut parfois être difficile de faire la distinction entre les nombreuses autres influences que subissent les prédateurs de ce niveau trophique et les influences qu'exerce sur eux le projet. Des participants aux audiences ont soutenu que la surveillance devrait plutôt porter sur des sujets tels que le périphyton, les macro-invertébrés benthiques, les lichens et autres petits mammifères qui seraient susceptibles de signaler plus tôt, et de façon plus précise, les effets du projet.

Par ailleurs, les effets sur les espèces des niveaux trophiques plus élevés ne sont pas tous indirects, liés à la chaîne alimentaire. On a aussi fait part à la commission des préoccupations suscitées par le fait que la VBNC ne se proposait pas de surveiller les mammifères marins, les caribous, les ours polaires et la sauvagine. La commission aborde cette question dans d'autres chapitres du présent rapport. La nation Innu, forte de son expérience avec l'Institut de surveillance et de recherche environnementales, a recommandé que la commission détermine les composantes valorisées de l'écosystème qui devraient être visées par le programme de surveillance, pour éviter de longs débats sur la question. Lors des audiences, la nation Innu convenait qu'il importait davantage d'établir en premier lieu une structure efficace de gestion environnementale offrant la possibilité de collaborer, dans une perpective d'efficacité, en vue d'élaborer un programme de surveillance susceptible de répondre aux intérêts des différentes parties. Les recommandations de la section 17.3 ont été formulées dans cette optique.

La nation Innu a également fait état de l'importance d'offrir un accès public en temps opportun aux données brutes et aux résultats analytiques du programme de surveillance, et elle a discuté des avantages qu'il y aurait à déterminer une zone de référence en vue de distinguer les altérations causées par le projet de celles qui sont causées par des influences environnementales d'une ampleur plus considérable, telles le climat ou le transport atmosphérique de contaminants sur de longues distances.

Le ministère des Pêches et des Océans du Canada a indiqué qu'il jouerait deux rôles distincts, soit celui de conseiller et celui d'organisme de réglementation. A titre d'autorité responsable, le ministère demanderait la VBNC de lui soumettre, avant le début des travaux de construction, le programme qu'elle propose, à des fins d'examen et d'approbation, et de démontrer qu'elle a consulté adéquatement les parties intéressées. Le ministère a indiqué que le programme de surveillance doit être soutenable sur le plan scientifique et comporter des objectifs de surveillance précis qui reposent sur des hypothèses vérifiables. Les parties s'entendent sur ce point.

Le ministère des Pêches et des Océans du Canada a également recommandé que la VBNC ajoute de nombreux paramètres aux volets du programme de surveillance qui concerne les milieux d'eau douce et marin; qu'elle effectue des études supplémentaires sur les conditions de base; qu'elle élargisse ses connaissances, vraisemblablement au moyen de diverses expériences, sur la toxicité éventuelle que peut produire le rejet en mer des effluents de nickel, de cuivre et de cobalt sur les espèces locales. (Voir le chapitre 7, Contaminants dans l'environnement et le chapitre 9, Environnement marin : Effets d'origine terrestre).

Par ailleurs, la VBNC a présenté, lors des audiences, une autre démarche qui mettait davantage l'accent sur la vérification des prévisions concernant les concentrations de contaminants et sur leur déplacement par les voies de pénétration dans le milieu aquatique, plutôt que sur les effets éventuels de ces contaminants sur diverses espèces et sur leur concentration dans ces espèces. La société minière a aussi proposé des mesures d'atténuation pratiques, le cas échéant.

Il semble que quelques-unes des frictions manifestes observées au cours de l'examen entre le ministère des Pêches et des Océans du Canada et la VBNC résultent des différences qui existent entre chacune des deux démarches : l'une, scientifique, cherche à comprendre davantage le fonctionnement des écosystèmes; l'autre, technique, cherche d'abord à éviter les problèmes ou à les détecter et à y remédier. Les deux démarches peuvent, et devraient dans le cas qui nous préoccupe, être complémentaires, à condition que les deux parties puissent se concentrer sur des domaines déterminants pour lesquels une connaissance écosystémique plus élargie constitue la meilleure façon de rehausser la pratique technique et d'améliorer par conséquent la performance environnementale.

La commission juge que les parties intéressées semblent avoir suffisamment de terrains d'entente, sur des questions majeures, pour leur permettre d'établir un consensus raisonnable en ce qui concerne la surveillance. Tous souhaitent un système de surveillance capable de fournir des renseignements significatifs et qui se fonde autant sur des connaissances scientifiques que sur le savoir autochtone. La commission croit qu'il est important de prendre le temps requis et d'investir les efforts nécessaires pour s'entendre sur le cadre de référence de la surveillance, qui devrait être beaucoup plus qu'une liste de points à surveiller. On devrait mettre l'accent en premier lieu sur la détermination des objectifs et des critères à utiliser pour sélectionner les paramètres.

La commission en conclut que le programme de surveillance élaboré, en vue de vérifier les prévisions, de mettre à l'essai les modèles et de fournir une information en retour destinée à améliorer la gestion de l'environnement, jouerait également un rôle déterminant pour rassurer les résidents locaux en ce qui concerne la protection adéquate de leur environnement selon des normes élevées et l'intégrité des ressources qu'ils utilisent. Les critères servant à déterminer les paramètres de la surveillance devraient être élaborés en conséquence.

La commission reconnaît la pertinence de la démarche de la VBNC, qui met l'accent sur les relations de cause à effet et sur les voies de pénétration immédiates. Reconnaissant toutefois que certains environnements récepteurs seraient touchés par de multiples sources, la commission estime que les paramètres devraient aussi être sélectionnés de façon à tenir compte des effets combinés sur l'écosystème qui seraient éventuellement produits par le projet. Elle appuie également l'intention de la VBNC de déterminer des seuils et des jalons servant à déterminer si des mesures d'atténuation supplémentaires sont requises.

La commission ne croit pas qu'il soit pertinent de sélectionner des paramètres de surveillance dans le cadre du présent rapport. Cette sélection devrait faire partie d'un processus plus large qui serait mené en collaboration. Elle croit cependant que les nombreuses discussions tenues lors des audiences au sujet des éventuels paramètres ont été utiles et qu'elles devraient être examinées avec soin. Il faudrait aussi examiner la nécessité d'instaurer une surveillance plus poussée des conditions de base en fonction des domaines retenus pour étude.

La commission comprend l'attrait qu'exerce une zone de référence qui servirait de point de comparaison avec le secteur qui subit l'incidence du projet. En raison du peu d'information fournie sur cette question au cours de l'examen, elle n'est pas en mesure de formuler une recommandation définitive à ce sujet, mais elle croit que la VBNC et le Conseil consultatif de l'environnement devraient se pencher sur les avantages et la faisabilité d'une telle démarche. Il est possible que l'Association minière du Canada, le gouvernement et d'autres établissements de recherche veuillent collaborer au maintien d'une telle zone de référence.

Recommandation 103

La commission recommande que la VBNC élabore le cadre de surveillance biophysique en collaboration avec les autres parties intéressées. Le cadre devrait reposer sur de solides assises scientifiques, sur la nécessité d'obtenir, relativement à la gestion de l'environnement, une information en retour qui soit pratique, ainsi que sur les préoccupations des résidents du Nord du Labrador et des utilisateurs des ressources. Le cadre de surveillance devrait comprendre une politique d'accès public aux données, des protocoles concernant la production de rapports, ainsi que des jalons pouvant servir à déclencher des interventions. Ce cadre devrait également tenir compte expressément de la nécessité de rendre le processus transparent et d'offrir au public un accès à l'information.

17.7.2 Surveillance des effets socio-économiques

Il est prévu que le projet produira un large éventail d'effets socio-économiques positifs et négatifs, notamment des changements sur les aspects suivants : le niveau d'emploi, les données démographiques des collectivités de la région, les entreprises existantes et nouvelles, les économies locales, le coût de la vie, le logement, la santé, la vie familiale, les interactions sociales et le bien-être des collectivités. Dans quelques cas, comme pour l'emploi direct, les effets du projet pourraient être manifestement observables, en autant qu'on tienne de bons dossiers. Dans la majorité des autres cas, il serait difficile d'isoler l'effet net du projet des effets produits par un certain nombre d'influences étrangères au projet.

La VBNC a indiqué qu'elle collaborerait avec les organismes gouvernementaux et différentes organisations en leur communiquant des renseignements utiles concernant le projet, comme des statistiques sur l'emploi ou l'activité économique, sous réserve de certaines restrictions relatives à la confidentialité. La province exigerait également de la VBNC qu'elle soumette trimestriellement des renseignements sur les avantages liés à l'emploi et à l'activité économique. La VBNC a également déclaré que les dispositions financières que comprendraient les ententes sur les impacts et les avantages étaient en partie destinées fournir à l'Association des Inuit du Labrador et à la nation Innu les ressources nécessaires pour effectuer toutes les études qu'ils jugeront nécessaires.

La commission a entendu peu de commentaires à ce sujet de la part des autres participants. La Commission des services de santé des Inuit du Labrador a présenté son projet de programme de surveillance des divers indicateurs de la santé de la collectivité, destiné à l'aider, à élaborer et à améliorer des programmes adéquats d'intervention. Ce programme ne vise pas exclusivement les effets du projet, qui pourraient être difficiles isoler, comme en a convenu la Commission des services de santé des Inuit du Labrador. Celle-ci a demandé à la VBNC de lui communiquer les renseignements nécessaires, dans la mesure du possible, ce que la société minière a accepté de faire.

La commission en conclut que la responsabilité en matière de surveillance des effets socio-économiques devrait être partagée. La VBNC assumerait les responsabilités suivantes :

  • fournir des renseignements permettant d'évaluer l'application du principe de contiguïté;
  • surveiller, en collaboration avec l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu dans le cadre de partenariats de surveillance, l'efficacité des mesures d'atténuation socio-économiques qu'elle a proposées, dont les plans de protection de l'environnement pertinents (concernant les ressources humaines, l'éducation et l'orientation, la participation des Autochtones et la participation de la population).

Il devrait aussi incomber à la VBNC de donner suite aux préoccupations ou aux problèmes de nature socio-économique qui sont attribuables au projet et qui ont été relevés grâce à la surveillance effectuée par l'Association des Inuit du Labrador, la nation Innu ou la province. Cela pourrait amener la VBNC à prendre des mesures correctives ou d'atténuation directes, ou collaborer avec d'autres parties pour déterminer la meilleure avenue possible.

La commission suppose que l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu auraient à effectuer une certaine surveillance fondamentale pour veiller à ce que la VBNC respecte les objectifs et les dispositions en matière d'emploi et d'activités économiques que prévoient les ententes sur les impacts et les avantages, et pour veiller à ce que les ententes sur les impacts et les avantages englobent des dispositions garantissant que ces objectifs et dispositions se concrétisent, notamment un processus qui permettrait de traiter les résultats d'une telle surveillance et qui comprendrait une méthode de règlement de différends, le cas échéant.

Le ministère des Pêches et des Océans du Canada, à titre d'autorité responsable, administre les exigences concernant le programme de suivi, mais la commission juge inadéquat qu'un ministère fédéral soit responsable d'assurer la prestation d'avantages locaux et régionaux. La province n'a présentement aucune exigence légale en matière d'encadrement de programme de suivi socio-économique, mais la commission prévoit que la province pourrait vouloir assumer cette fonction en collaboration avec des partenaires fédéraux et des organismes autochtones. La commission prévoit qu'un tel programme non seulement fournirait des renseignements permettant d'améliorer les mesures d'atténuation et d'orienter l'allocation des ressources provinciales, mais qu'il aiderait aussi la province à donner suite à d'autres projets majeurs et à en planifier, en particulier au Labrador.

A la différence d'un programme de suivi exigé par la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, qui vraisemblablement porterait surtout sur la surveillance du travail effectué par la VBNC, la commission prévoit que le programme de suivi socio-économique engloberait la surveillance effectuée par l'Association des Inuit du Labrador, la nation Innu, ainsi que les organismes provinciaux et régionaux.

Recommandation 104

La commission recommande que la province charge un ministère ou un organisme provincial d'élaborer et de superviser un programme correspondant au programme de suivi exigé par la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, qui porterait surtout sur les effets socio-économiques du projet. L'objectif de ce programme serait de vérifier les prévisions de l'étude d'impact environnemental, pour veiller à ce que la VBNC respecte ses engagements de nature socio-économique, d'évaluer l'efficacité des mesures d'atténuation et d'orienter l'allocation des ressources provinciales pour les services et l'infrastructure. Ce programme de suivi socio-économique devrait être élaboré en collaboration avec le Conseil consultatif de l'environnement.

Recommandation 105

La commission recommande que la VBNC soit tenue de soumettre un rapport annuel au ministère provincial désigné comme autorité responsable du programme de suivi socio-économique (voir la recommandation 104), et au Conseil consultatif de l'environnement. Le rapport décrirait les résultats du projet en matière de réalisation des avantages socio-économiques aux membres de l'Association des Inuit du Labrador et de la nation Innu, ainsi qu'aux résidents et entreprises du Labrador. S'il y a lieu, le Conseil consultatif de l'environnement pourrait fournir des recommandations sur les mesures d'atténuation ou d'amélioration aux organismes économiques provinciaux et régionaux concernés et à la VBNC.

La commission convient que l'Association des Inuit du Labrador et la nation Innu devraient entreprendre la surveillance des effets socio-économiques dans les collectivités, avec le concours d'autres partenaires, le cas échéant. Ces partenaires comprendraient notamment la province, en particulier en ce qui a trait aux soins de santé, à l'éducation, au logement, aux services et aux équipements d'infrastructure. L'université et d'autres institutions de recherche pourraient être intéressées à soutenir différents aspects de la recherche sociale et communautaire.

Comme pour la surveillance du milieu naturel, la commission estime que l'examen de la surveillance socio-économique devrait reposer sur des objectifs précis, lesquels se fonderaient sur des hypothèses vérifiables. De plus, la structure de la surveillance devrait permettre, dans la mesure du possible, de distinguer les effets du projet selon les sexes et l'âge, afin de suivre les progrès accomplis en matière de répartition équitable des avantages socio-économiques.

Recommandation 106

La commission recommande que la VBNC fournisse une ventilation selon le sexe pour toutes les données sur l'emploi présentées dans ses rapports trimestriels à la province.

17.8 Inclusion du savoir autochtone dans les futures évaluations environnementales

La commission constate que l'exigence concernant l'examen exhaustif du savoir autochtone dans une évaluation environnementale est très récente, et que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne fournit aucune indication à ce sujet. La commission d'évaluation environnementale qui a précédemment eu des directives en ce sens (le projet de mine de diamants de la BHP des Territoires du Nord-Ouest) constatait plusieurs difficultés à mettre cette exigence en application, qu'elle attribuait une absence d'orientation de la part du gouvernement. Cette commission a recommandé que « le gouvernement du Canada élabore une politique sur l'inclusion du savoir traditionnel dans les évaluations environnementales , qui répondrait à la nécessité « d'énoncer les directives et les normes auxquelles les promoteurs doivent satisfaire en préparant une évaluation environnementale ». La commission sur le projet de mine de diamants de la BHP des Territoires du Nord-Ouest a également constaté la nécessité de définir « le rôle et la responsabilité du gouvernement dans ce domaine . A la connaissance de la présente commission, le Canada n'a pas encore pris de mesure relativement à cette recommandation.

La VBNC a indiqué à la commission qu'elle avait eu des difficultés à inclure le savoir autochtone dans son étude d'impact environnemental. Elle attribuait ces difficultés :

  • la mise en uvre de l'évaluation dans un contexte de négociations d'une grande complexité portant sur d'autres sujets avec les mêmes parties, ce qui compliquait à la fois l'accès au savoir autochtone et la capacité de planifier et d'effectuer des recherches efficaces;
  • l'absence d'une définition établie du savoir autochtone.

La VBNC a accepté les recommandations de la commission sur le projet de mine de diamants de la BHP des Territoires du Nord-Ouest, et a également recommandé que les responsabilités des gouvernements autochtones soient tirées au clair à ce propos.

La commission reconnaît la difficulté de la tâche confiée à la VBNC. Les Autochtones peuvent être l'unique source en ce qui a trait à certains renseignements jugés nécessaires dans une étude d'impact environnemental, mais il peut arriver qu'un promoteur ne puisse pas toujours (ou même normalement) obtenir ces renseignements d'eux, que ce soit pour des raisons pratiques ou morales. Un promoteur ne peut être tenu d'inclure le savoir autochtone dans son étude d'impact environnemental si ceux qui possèdent ce savoir ne veulent pas le lui communiquer à cette fin. Il peut être souhaitable qu'un promoteur et les parties autochtones concernées élaborent une démarche de coopération pour évaluer les effets, mais ce n'est pas toujours possible et ce ne peut donc être considéré comme une exigence pour une évaluation environnementale. Il est raisonnable qu'un promoteur fournisse un soutien matériel pour que le savoir autochtone ait une portée sur une évaluation environnementale, comme ce fut le cas dans la présente évaluation.

La commission tire les conclusions suivantes de son expérience avec le présent examen :

  • Une évaluation environnementale devrait inclure toutes les sphères du savoir autochtone, et non pas seulement leurs connaissances traditionnelles en matière d'écologie.
  • Il est presque à coup sûr plus efficace pour un promoteur de fournir un soutien matériel pour aider les Autochtones à divulguer directement leur savoir au processus d'examen public, plutôt que d'être tenu de l'inclure dans sa propre étude d'impact environnemental. Toute directive cet égard faite aux promoteurs devrait tenir compte du contexte politique dans lequel les projets de développement se réalisent, et ne devrait pas imposer d'exigences que les promoteurs ne peuvent, ni ne devraient remplir.
  • L'examen à part entière du savoir autochtone lors d'audiences techniques ne se traduit pas par une acceptation inconditionnelle, mais plutôt par le fait d'y accorder autant d'attention que s'il s'agissait de connaissances présentées par d'autres experts.
  • Les futures commissions devraient disposer d'une grande latitude dans l'élaboration de leurs propres directives quant à la portée que doit avoir le savoir autochtone sur leurs propres examens, en fonction de leurs circonstances particulières, de ce qu'elles apprennent dans leurs réunions visant à déterminer les problèmes et les priorités de l'évaluation et de l'expérience des commissions antérieures.
  • Les politiques ou directives gouvernementales officielles qui prétendent définir le savoir autochtone, ou la façon de l'utiliser ou de l'interpréter, n'aideront probablement pas le processus d'évaluation environnementale. Une telle démarche ne semble pas plus sérieuse que de tenter de définir la science ou toute autre forme de savoir aux fins d'une politique gouvernementale.

Recommandation 107

La commission recommande que le Canada et la province englobent dans leur processus respectif d'évaluation environnementale le principe de l'examen exhaustif des connaissances autochtones en matière écologique. La commission recommande également qu'on étende le champ de ces connaissances l'ensemble du savoir autochtone. Les gouvernements devraient fournir une orientation aux promoteurs en ce qui concerne leurs obligations fondamentales et leurs options en matière d'application du savoir autochtone dans une étude d'impact environnemental ou de sa présentation dans le cadre du processus d'examen public. Des indications plus précises sur la manière d'utiliser le savoir autochtone dans les examens futurs devraient être fournies par les commissions responsables, au cas par cas.

17.9 Effets cumulatifs

Comme l'exige la commission, la VBNC a abordé les effets cumulatifs sur l'environnement, en évaluant les effets prévus du projet, conjugués aux effets éventuels des projets et activités « qui sont en cours ou seront vraisemblablement mis en uvre, et qui ont par conséquent obtenu des permis, des licences, des baux, ou toute autre forme d'autorisation, comme le précise l'Agence canadienne d'évaluation environnementale ». Les prévisions de la VBNC quant aux effets cumulatifs ont été ajoutées aux chapitres de l'étude d'impact environnemental traitant des composantes valorisées de l'écosystème. La commission a également agi de manière semblable avec des conclusions et des recommandations formulées dans d'autres chapitres, le cas échéant.

La commission estime que de futures évaluations environnementales pourraient être en mesure de jouer un certain rôle dans la gestion des effets cumulatifs, mais remarque que bon nombre des pressions seraient exercées sur l'écosystème et les collectivités du Labrador septentrional sans pour autant faire l'objet d'aucune évaluation en règle.

La nation Innu a recommandé à la commission qu'une planification régionale axée sur l'écosystème soit réalisée à l'échelle du paysage, pour déterminer et protéger des processus écologiques fondamentaux, des fonctions, des paysages et des corridors de migration. L'Association des Inuit du Labrador souhaite également effectuer un plan de gestion des opérations maritimes, en fonction d'une analyse écologique semblable. La commission constate également que la province a mis en place un réseau d'écologistes des écosystèmes de la région.

La commission en conclut que les responsabilités de la VBNC à l'égard des effets cumulatifs sont de :

  • réduire au minimum les effets du projet sur l'environnement grâce une bonne planification et à l'élaboration et à la mise en uvre efficace de son système de gestion environnementale;
  • mettre en uvre un programme valable de surveillance des effets;
  • communiquer les renseignements nécessaires et contribuer à la recherche collective, s'il y a lieu.

La commission estime que le Conseil consultatif de l'environnement proposé dans le présent rapport constituerait une tribune convenable où les quatre parties au protocole d'entente pourraient aborder des questions concernant les effets cumulatifs s'il s'en produit. La commission espère également que les quatre parties, conservant l'esprit de collaboration manifesté pendant la durée du présent processus d'examen, déterminent conjointement des initiatives de recherche régionale, de planification et de gestion des ressources qui pourraient se révéler nécessaires pour assurer la protection de l'environnement et le développement de collectivités durables au Labrador septentrional.